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Marie Louise Von Franz�d. J. Renard. collection La Fontaine de Pierre, Paris, 2003 � lecture faite par Claudia Samson � Mots-clefs�: Femme, conte, Marie-Louise Von Franz, anima, animus, arch�type, autonomie, individuation � Une �tude des repr�sentations f�minines dans les contes de f�e. Marie-Louise von Franz a publi� de nombreux ouvrages, en particulier sur l�interpr�tation des contes de f�es dont douze ont d�j� paru en fran�ais. Collaboratrice de Carl Gustav Jung et continuatrice de son �uvre, elle entama cette �tude pour r�pondre � une commande et la poursuivit ensuite sur la base des interpr�tations jungiennes profond�ment convaincue que la psychologie des profondeurs indique � la femme le chemin de la connaissance d'elle-m�me de son �tre vrai et de ses exigences... (p. 15)
Le conte de f�e est une cr�ation po�tique qui puise son inspiration dans la m�moire collective. Cette cr�ation est �adapt�e et actualis�e en fonction du lieu, de la culture et de l��poque dans lesquels elle s�exprime. Si le conte est principalement une forme de distraction il a aussi une fonction psychologique et exprime les processus psychiques de l�inconscient collectif. L'existence d'un inconscient collectif ayant ses propres symboles, communs � diff�rentes cultures, voire universels,� que Carl Gustav Jung a appel� des arch�types, est la d�couverte majeure du fondateur de la psychologie des profondeurs. Ainsi les figures f�minines des contes de f�es expriment certains de ces arch�types, des contenus inconscients qui rel�vent du principe f�minin. Un tr�sor collectif�: les arch�typesDirectement li�s � nos instincts et se manifestant uniquement par des images symboliques, leur origine n�est pas connue mais on les retrouve partout. Ils montrent une connaissance et une sagesse commune � l�ensemble de l�humanit�. Chaque arch�type est dou� d�une initiative propre et d�une �nergie sp�cifique et ses repr�sentations ne sont pas statiques. Ils travaillent donc diff�remment en chaque individu. Les arch�types sont des structures n�cessaires � la construction de la psych� et si on les attache souvent � des images mythologiques d�finies il n�en demeure pas moins que leurs repr�sentations sont infiniment variables, seule leur structure fondamentale demeure. D�s lors que les arch�types repr�sentent une m�moire ancestrale de l�humanit� il n�est pas surprenant d�en retrouver les th�mes au sein des mythes, l�gendes, r�cits d�aventure, et sous une forme simplifi�e dans les contes. L��lan de l�inconscient est � l�origine m�me du trouble n�vrotique en ce qu�il tente de pousser l�enfant vers un niveau de conscience sup�rieur et � construire un complexe du Moi plus solide, cet �lan est donc un trait humain g�n�ral, un arch�type qui �mane du Soi (p. 49) Que l'arch�type soit transpos� par le biais du h�ros ou de l'h�ro�ne du conte de f�es ou encore figur� par un objet, qu'il prenne une repr�sentation animale ou v�g�tale, il repr�sente un aspect du Moi qui tend � nous mettre en relation avec notre totalit� psychique contribuant ainsi � la construction d'un Moi plus fort, plus �labor�. Les comportements du h�ros sont alors des indicateurs sur les attitudes � adopter pour tendre � la r�alisation de la totalit� psychique. La femme au plan� pratique ne dispose d'aucune repr�sentation qui puisse �tre per�ue comme d'une port�e collective et corresponde � sa structure �motive et instinctive naturelle ce qui explique l'abstraction des figures f�minines des contes de f�es. Cependant, malgr� la rupture depuis l'histoire du Christianisme qui diabolise la femme pour des raisons politiques, le th�me de la D�esse-M�re demeure et s�il �tait peut-�tre n�cessaire pour notre d�veloppement culturel que l�esprit occidental fut amen� � �loigner la d�esse-m�re pendant un certain temps pla�ant l�accent sur le d�veloppement du p�le masculin de la psych� (p. 63), la restauration des valeurs f�minines s�impose aujourd�hui pour faire face � l�ampleur des d�g�ts caus�s dans le monde alors qu��uvre un principe masculin qui en s'exprimant �par la notion d'ordre, de justice et de loi occulte des instincts naturellement s�v�res, vengeurs. La place r�serv�e au principe f�minin est souvent celle de l'expression de l'indulgence, charit�, douceur mais il est impossible de d�cider arbitrairement comment il convient de ma�triser un dieu (p67). Ceux-ci s�expriment avec leur part de duret� dans les contes, certaines figures f�minines nous ram�nent aux sources des d�esses mythiques, nous d�signant ce qui, aujourd'hui, dans la nature f�minine rel�ve de ces aspects oubli�s, ignor�s ou occult�s. Le principe f�mininPour d�signer l�arch�type f�minin, symbole universel de la femme, Carl Gustav Jung s'est servi du mot latin anima qui signifie �me. Animus en est le compl�ment qui d�signe l�arch�type masculin, symbole universel de l�homme. Anima et animus sont deux p�les de l'�me, compl�mentaires et contraires, constituant l'inconscient. L'anima� d�signe l'image inconsciente de la femme en g�n�ral que tout homme porte en lui : � l'id�al f�minin �. L'anima d�signe aussi la part f�minine, c'est-�-dire les caract�ristiques habituellement attribu�es aux femmes, sensibilit�, �motivit�, intuition, sentiment qui s'exprime en chaque homme. L'anima est pourvoyeuse d'humeurs. Positive, l'anima d�veloppera les dons de l'homme, lui fera id�aliser la femme, le rendra entreprenant. L'anima n�gative se manifeste chez lui par des difficult�s � contr�ler sa sensibilit�, son �motivit�. Il pourra manifester des sautes d'humeur, des tendances aux caprices, se montrer irritable, vindicatif, tyrannique, m�fiant. Pour se r�aliser de fa�on �quilibr�e dans sa totalit�, l�homme a besoin de d�velopper son anima, ses qualit�s f�minines et son �ros, il devra apprendre � tenir compte des relations individuelles et concr�tes et ne pas se perdre dans son monde rationnel. (p. 109) Le principe masculinLa femme porte en elle un ��id�al masculin��, une repr�sentation inconsciente des hommes en g�n�ral. L�animus, p�le masculin �poss�de certaines des caract�ristiques traditionnellement attribu�es � l'homme�: rationalit�, intellectualit�, cr�ativit�, ind�pendance, autonomie. L'animus est pourvoyeur d'opinions. Les Jungiens nous disent qu'un animus positif rend la femme cr�atrice, aimante, inspiratrice, conqu�rante, qu�il d�veloppe en elle le courage, la spiritualit�, qu'elle apprend � l'homme � m�rir, le soutient dans ses �preuves, assure sa compl�mentarit�. Une des t�ches de la femme est de cr�er une certaine atmosph�re autour d�elle�avoir foi en sa famille et nourrir des espoirs pour elle est l�un des r�les de l�attitude maternelle et invite � y r�pondre (p87) � l'inverse un animus n�gatif peut rendre la femme autoritaire, t�tue, agressive ou infantile. Marie Louise Von Franz d�crit avec d�tails les diverses formes repr�sentatives de l�animus n�gatif dans les contes �tudi�s. Elle insiste �galement sur les diff�rentes attitudes � adopter lorsque la femme est confront�e aux caprices de l'animus ou signifie les situations desquelles naissent ou se d�veloppe un animus n�gatif. La fa�on dont les phantasmes inconscients� du p�re affectent ses filles est une �vidence quand l�homme qui ne vient � bout de son probl�me d�anima reporte ses imaginations sur elles (p. 88). Le conte ��Neige Blanche et Rose Rouge�(p 99) nous montrera les pi�ges tendus par l�animus qui peut �avoir une prise de puissance telle qu�il envahit, la poss�de totalement tandis que ��La jeune fille sans mains�� (p. 135) illustrera les difficult�s de la femme � faire na�tre ses dons cr�ateurs. Afin de ne pas se laisser poss�der par l'animus la femme devra s'attacher � transformer, cultiver, d�velopper sa justesse int�rieure. Un rapport constant � soi et aux autresAccepter et comprendre ces r�alit�s psychologiques que sont l'anima et l�animus, c'est �tre plus conscient de soi et d'une certaine mani�re se rendre accessible � l'autre. C'est nous accepter pleinement dans nos potentialit�s et nos capacit�s et tendre � la r�alisation de celles-ci. �tant alors en mesure de cerner ce qui est en nous et peut se projeter sur l'autre nous pouvons mieux percevoir ce qui en lui rel�ve de l'�tre vrai r�el, notre attitude � son �gard tendant alors plus � un partenariat, une compl�mentarit� qu'� une attente frustrante de la concr�tisation de nos propres d�sirs par l'autre. Il faut consid�rer les interactions de l'anima et de l�animus en tant que repr�sentations inconscientes, comme une part constante dans tous les rapports que nous �tablissons avec l'autre sexe � homme/femme�; m�re�/fils�; p�re/fille � et que lorsque un homme et une femme se choisissent ils auront � �tablir non seulement des rapports conscients entre eux mais aussi � composer avec leurs anima/us respectifs. � Ces images inconscientes parce qu'elles d�terminent nos attentes et nos �perceptions non seulement de l'autre sexe mais aussi celle que nous avons de nous-m�mes sont fondamentales. Il importe de prendre conscience �de ces deux aspects � p�le f�minin et masculin � que nous portons en nous parce qu�ils d�terminent une grande part de nos comportements et participent de la construction des st�r�otypes homme/femme d'une �poque donn�e. Une voie vers l�autonomie�: l�individuationOn peut dire que l�inconscient
renferme tous les �l�ments psychiques qui n�atteignent pas ou
n�atteindront que plus tard Il y a des choses sur lesquelles on ne peut m�me pas se questionner soi-m�me et qu'il faut laisser dans le clair-obscur pour ne pas les violer, les fl�trir, les tuer. Comme le papillon dans le cocon, certains aspects secrets de l'�me ne peuvent se d�velopper que dans le sein de l'obscurit�... (p. 163)
La premi�re �tape de ce processus conduit � faire l�exp�rience de l�ombre, le c�t� sombre de soi. C�est la partie de nous que nous refusons de pr�senter aux autres, qui ne nous semble pas convenable. L��motion la rend visible. Se confronter � notre ombre c�est prendre conscience de notre nature de mani�re critique, accepter que ce que nous condamnons chez les autres se trouve aussi en nous. S'agissant de l'int�gration des �l�ments de l'inconscient il faut garder en m�moire qu'un �quilibre se cr�e et la n�cessit� d'accepter des passages d�pressifs, de se tenir � une distance respectueuse parfois de sa part d'ombre et de lumi�re. L'acceptation de l'ombre (ou c�t� sombre des dieux et d�esses), part d'ombre dans les mythes, �motions violentes, d�pression, souffrance sont des moments n�cessaires � l'�volution. La deuxi�me �tape est la rencontre avec l�anima ou l�animus. Comme l�ombre on peut les rencontrer sous leur forme int�rieure, symbolique. Pour la femme concr�te acqu�rir de l'autonomie, c�est acqu�rir une meilleure connaissance d'elle-m�me, de sa nature, de ce qui �en elle rel�ve du principe masculin et de la fa�on dont celui-ci tend � prendre possession d'elle, dont il exprime volont� et pouvoir. L'animus sous son aspect positif favorise l'expression des �nergies cr�atives, sous son aspect n�gatif il incarne un esprit de d�couragement et de r�criminations, d�bordant, il est destructeur. La femme, d�s qu'elle entre en contact avec l'inconscient est plus directement confront�e � la philosophie de la vie et au probl�me du mal parce que l'animus est concern� par les id�es g�n�rales et des concepts. D�s qu'elle entreprend le voyage � l'int�rieur d'elle-m�me elle se trouve face au probl�me spirituel... (p.� 168) . Il ne faut pas surestimer ni sous-estimer les�pouvoirs
et les diff�rents aspects de La derni�re �tape conduit � la r�union du conscient et de l�inconscient, l�apparition du Soi comme un point repr�sentant le centre de la totalit� psychique. Un �quilibre entre la r�alit� ext�rieure et la r�alit� int�rieure. Cela signifie que l�ensemble de ce processus nous conduit � reconna�tre ce que nous sommes par nature, en opposition � ce que nous souhaiterions �tre. L�une des m�thodes de progression sur la voie de l�individuation est l�utilisation des capacit�s des forces imaginatives, ce que Carl Gustav Jung a appel�: l�imagination active. Tout comme les r�ves qui sont consid�r�s comme un passage pour l�inconscient personnel et pour l�inconscient collectif, les capacit�s de la force imaginative qui provoquent l�apparition d�images et repose sur un abaissement voulu de la conscience le sont aussi. L�, certaines associations s��veillent en nous que nous ne pourrions pas percevoir au seul moyen de nos perceptions conscientes. Cela fait partie des processus d�individuation d�accepter et de comprendre ces images, cette part de nous, primitive, qui appara�t sous une impulsion �motionnelle. L�int�gration du sens v�ritable peut se faire d�s lors que l�on reconna�t que ces images sont le reflet des processus psychiques � l��uvre sans chercher � les relier � des situations de r�f�rence. En laissant vivre l��motion loin de tout sens critique. Une union des principesSi une femme donne place dans sa vie � un animus puissant et affirme sa personnalit� de fa�on cr�atrice et juste, l��quilibre se fait avec son c�t� f�minin�les �nergies masculines et f�minines se compl�tent et s��pousent alors� (p. 266)
Par bien des aspects le principe f�minin a �t� occult� de l�histoire de l�Homme. Les mouvements collectifs ont �t� nombreux qui participent d�une prise de position plus forte par la femme. Hommes et femmes, dans cette situation nouvelle, ont besoin de rep�res nouveaux, de pouvoir se repositionner dans un monde int�rieur et ext�rieur de mani�re harmonieuse. La femme peut, par la voie de l'individuation, en d�veloppant sa sagesse int�rieure, sa fantaisie et sa souplesse intellectuelle donner de la subtilit� � l�animus. Donner de la subtilit� � l�animus signifie le rendre capable de trouver une solution adapt�e � chaque situation et de savoir ce qui est juste dans tel cas particulier� cette sagesse subtile et juste, ce discernement par rapport aux situations et aux �tres est l�une des qualit�s les plus pr�cieuses de la femme accomplie. (p. 307) Conna�tre sa propre nature, accepter que celle-ci se r�v�le dans ses merveilles et dans ses horreurs, reconna�tre notre capacit� � �tre plus conscient tout en gardant � l'esprit que ces transformations issues de l'inconscient contiennent une grande part de myst�re c'est prendre� sa place dans le monde mais aussi parmi les autres. Oeuvrer � sa propre individuation est donc un minimum pour participer � la transformation de l�attitude collective. Mais s�il nous faut reconna�tre notre capacit� � nous transformer et concevoir ces transformations comme une avanc�e il faut aussi garder � l�esprit que l�on ne peut le faire seul. Avancer sur la voie de l�individuation n�cessite un accompagnement ne serait-ce que parce que travailler sur soi est difficile et long et comporte des risques que l�on ne peut ignorer, le moindre d�entre eux consistant � rester enferm� dans le cercle de ses projections. Un autre risque est r�v�l� par la m�thode elle-m�me qui, utilis�e par des individus � la morale douteuse pourrait �tre employ�e � des fins �litistes. Ainsi le livre de Marie-Louise Von Franz, au-del� d��tudier ce que les contes de f�es mettent en exergue du principe f�minin nous montre que les mod�les traditionnels n�ont plus cours et que d�s lors qu�il s�agit de susciter de nouvelles formes de f�minit� chez la femme et un nouvel� aspect de l'anima chez l'homme, la n�cessit� joue en faveur d�une f�condation r�ciproque du principe masculin et du principe f�minin, les deux se trouvant en chacun de nous. Bibliographie�:Alchimie une introduction au symbolisme et � la psychologie (1981), �d. La Fontaine de Pierre Alchimie
et imagination active�(1979),
�d. Jacqueline
Renard
Aurora
Consurgens le lever de l'aurore
(1966), �d.
C.G.
Jung son mythe en notre temps
(1975), �d.�Buchet
Chastel
C.G.
Jung et la voie des profondeurs,
�d. La
Fontaine
de
Pierre
La d�livrance dans les contes de f�es, �d. Jacqueline Renard La
l�gende du Graal
(1970), �d.
Albin
Michel - collection sciences et symboles
L'�ne
d'Or
(1978), �d. La
Fontaine
de
Pierre
La passion de Perp�tue un destin de femme entre deux images de Dieu (1949), �d. Jacqueline Renard La
princesse chatte,
�d. La
Fontaine de Pierre
La
psychologie de la divination, �d.
Albin
Michel - poche
La
voie de l'individuation dans les contes de f�es
(1978), �d.
La
Fontaine de Pierre
Les
mod�les arch�typiques dans les contes de f�es,
�d.
La
Fontaine de Pierre
Les
mythes de cr�ation�(1982),
�d. La
Fontaine de Pierre
Les
r�ves et la mort,
�d.
Fayard
- collection l'espace int�rieur
Les
visions de Saint Nicolas de Flue�(1959),
�d.
La
Fontaine de Pierre
L'homme
et ses symboles,
�d.
Robert
Laffont
L'interpr�tation
des contes de f�es�(1978),
�d.
Jacqueline
Renard
L'ombre
et le mal dans les contes de f�es
(1980), �d.J
acqueline Renard
Mati�re
et psych�,
�d.Albin
Michel
Nombre et temps� psychologie des profondeurs et physique moderne�(1978), �d. La Fontaine de Pierre. Psychoth�rapie,
�d.Dervy
Reflets
de l'�me,
�d.M�dicis-Entrelacs
R�ves
d'hier et d'aujourd'hui,
�d.Albin
Michel - poche / Jacqueline Renard
Sites internethttp://marie-louisevonfranz.com/en/ http://lafontaine.depierre.free.fr/marie_louise_von_franz(30).html http://www.cgjung.net/mlvf/index.htm http://www.ygora.net/nav/page_index/contes/presentation_auteurs/marie_louise_von_franz.htm � Claudia Samson, Port de Bouc, mars 2005 |
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