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Ressources documentaires � Bibliographie
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David Le Breton

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Anthropologie du corps et modernit�

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P.U.F., col. Sociologie d'aujourd'hui

1990, 264 p., 148 F

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Constatant l'�clatement contemporain des savoirs sur le corps et le d�calage croissant qui se manifeste entre l'exp�rience sociale des acteurs et leur capacit� d'int�gration symbolique, D. Le Breton fait le d�tour de l'ethnologie et de l'histoire pour mettre au jour les rapports du corps et de la modernit�. C'est une probl�matique de la gen�se de l'individualisme dans le monde occidental qui permet d'expliquer la promotion historique du corps : cessant d'�tre le membre ins�cable d'une communaut� indivise, l'individu s'autonomise dans un corps. On peut ainsi penser ensemble l'�mergence du portrait dans la peinture, la constitution du savoir anatomique et le processus d'individuation. Le XVIIe si�cle est marqu� par une coupure radicale : devenant un objet parmi d'autres, d�sacralis� par la g�n�ralisation de la m�taphore m�canique, le corps perd sa dignit� et fait l'objet d'une perception ambivalente. L'entreprise scientifique s'efforce de dupliquer le corps, de reproduire sa magnifique machinerie en m�me temps que, s'en d�fiant, elle ne cesse de chercher les moyens de s'en d�barrasser, ou � tout le moins de le contenir ou de le contourner. D. Le Breton croit pouvoir d�celer � ce propos un v�ritable fantasme de l'abolition du corps. Sur ce socle historique, il est possible de faire l'analyse du "corps pr�sent-absent" comme caract�ristique de la modernit�. �vitement, effacement, refoulement permettent de d�finir les modes de socialisation des manifestations corporelles : le corps ne transpara�t que dans les moments de crise. Le discours contemporain sur la lib�ration des corps, de m�me que son exhibition parfois ostentatoire ne remettent pas vraiment en question la constitution historique de ce dispositif : le souci du corps n'est que le prolongement de l'oubli du corps. La biologie contemporaine m�ne � son terme la fragmentation du corps, devenu collection d'organes soumis � la loi de l'�change g�n�ralis� : mais la pr�carit�, le vieillissement et la mort ne cessent de tracer les limites d'une probl�matique du corps machine dont l'homme bionique constitue l'horizon.

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Denis Duclos

La Peur et le savoir. La soci�t�

face � la science, la technique

et leur dangers

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La D�couverte, col. Science et soci�t�

1989, 312p; 140 F

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Sous la direction de Bernard Crousse

et Luc Rouban

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Progr�s scientifique et d�bat �thique

Plaidoyer pourl'analyse politique

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Le Cerf/Cujas

1989, 232 p., 134 F

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Ces deux livres ont une pr�occupation commune, que d�voilent leurs titres : il est des limites sociales � imposer � la science et aux technologies. Plus politique et �thique dans ses questions, l'ouvrage collectif regroupe des textes de r�flexion �crits par B. Crousse, J. Conrad et E. J. Woodhouse et quatre chapitres plus centr�s sur les politiques de la science (r�dig�s par D. Bertrand, J. Delville et M. Mercier, L. Rouban et Y. de Hemptinne). L'ensemble est pr�c�d� d'un article d'A.�J. Tudesq sur la manipulation de l'opinion publique.

Le livre de D. Duclos est plus sociologique dans sa d�marche, plus syst�matique - plus percutant aussi. Son objet premier est de comprendre la s�paration farouche que s�cr�te notre soci�t� entre "mat�rialit� et civilit�", science et culture, technique et humanit�, de comprendre notre refus du m�lange intime, en chacun de nos gestes, de nos espoirs et de nos craintes, des raisons et des �motions. Un autre objet du livre est de d�duire de ce constat la nature complexe de la relation de nos soci�t�s aux risques technologiques. La th�se de D. Duclos est qu'il ne peut y avoir de vision unitaire du risque, qu'il faut substituer � la sacralisation de l'expert travaillant dans le secret de son savoir (sp�cialit� que les Fran�ais ont pouss�e � sa limite) l'acceptation du caract�re composite et n�cessairement conflictuel de l'�valuation raisonnable des dangers technologiques.

En ce sens, l'ouvrage de Duclos est un livre militant qui plaide pour la transparence et la d�mocratie sociale, contre l'autoritarisme et les certitudes du complexe technique. Passant en revue les logiques profondes des divers groupes experts (scientifiques, ing�nieurs, politiques...), l'auteur conclut que la pleine n�gociation autour des choix technologiques est la seule solution pour d�jouer la "politique de la peur" et pr�venir v�ritablement les catastrophes majeures.

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Lucien Regnault

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La vie quotidienne des P�res du d�sert

en Egypte au IVe si�cle

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Hachette, col. La Vie quotidienne

1990, 328 p., 118 F

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Apophtegmes des P�res traduits

et comment�s

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Editions de Solesmes

1990, 160p., 48 F

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En collectant et en traduisant ces fameux apophtegmes des P�res du d�sert - quelque trois mille paroles incisives qui sans rh�torique aucune vous p�trifient ou vous lib�rent -,L�Regnault est devenu l'un des rares interpr�tes d'une exp�rience mystique extr�me, situ�e aux confins de toute nationalit�, de toute normalit�, mais au c�ur d'une passion d�vorante pour l'Evangile.

Au sens strict, il s'agit des ermites qui, tout au long des IVe et Ve si�cles, ont choisi de vivre au milieu du d�sert d'Egypte, loin des villes et des honneurs, nus sous le soleil, rong�s par les insectes, combattant seuls et sans rel�che le d�mon des tentations. Il faut pourtant, gr�ce � ce livre passionnant, d�couvrir sous une peau dess�ch�e et totalement durcie l'exercice (ou l'asc�se) d'une sensibilit� et d'une humanit� qui d�fient le d�sert comme une source cach�e, celle de la foi pure.

La vie quotidienne des P�res du d�sert est connue essentiellement par la Vie de saint Antoine, �crite par saint Athanase en 357 ; les t�moignages de saint J�r�me, de Rufin d'Aquil�e et de Cassien compl�tent des informations au demeurant difficiles � v�rifier, tant � chaque instant il s'agit de d�m�ler la l�gende de la r�alit� historique. Le monde des ermites est habit� par l'imaginaire ; � leur mani�re, ils anticipent la querelle des images et s'efforcent pr�cis�ment de les �purer pour n'admettre que la seule image parfaite de la ressemblance avec Dieu. V�ritables champion de la lutte contre l'ariantisme, qui faillit d�naturer le jeune christianisme des premiers si�cles, les anachor�tes du d�sert nient la chair pour la purifier, l'exalter et l'offrir dans une sublime oblation � son cr�ateur. Il faut tout le talent de L. Regnault pour nous faire comprendre un genre de vie compl�tement �tranger � tous les conformismes, qui n'exerce de v�ritable fascination que chez des c�urs d'artistes assoiff�s de beaut� d'absolu. Ces hommes ivres de Dieu (J. Lacarri�re) surgissent alors plus vivants que jamais.

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Jean Delumeau

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L'Aveu et le pardon. Les difficult�s

de la confession. XIIIe - XVIIIe si�cle

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Fayard

1990, 208p., 89 F

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Aucune religion ne s'est tant souci�e de l'aveu r�p�t� des p�ch�s que l'�glise catholique. Le pr�c�dent ouvrage de� J.�Delumeau, Rassurer et prot�ger. Le sentiment de s�curit� dans l'Occident d'autrefois, s'�tait d�j� pench� sur ce dossier essentiel. Celui-ci en rassemble avec �clat l'argumentation, depuis l'acte d�terminant que fut la d�cision du concile de Latran IV, en 1215, de rendre obligatoire la confession annuelle, jusqu'� ses r�percussions � l'�poque moderne, avec un regard insistant sur le moment o� la question du pardon a tant passionn� Pascal, Boileau et Bossuet. Parti d'une documentation � tendance normative - manuels des confesseurs, trait�s de casuistiques, sermons, qui indiquent en d�tail la mani�re de confesser et de se confesser - , il propose une r�flexion nouvelle sur le comportement v�cu des pr�tres et des croyants face � la question de la faute.

Aux confesseurs, les consignes recommandent d'�tre des p�res indulgents. Ainsi que la notion antique de pater familias qui exerce son autorit� se transforme en profondeur pour conduire � celle de la figure �vang�lique et moderne de la tendresse affectueuse. Pourtant, l'image l�nifiante du pardon g�n�reusement accord� ne voile pas l'histoire contradictoire de la peur� et de la culpabilit� : l'�glise pardonne, mais elle inqui�te, elle permet le progr�s de la connaissance de soi, mais elle traumatise le p�cheur par le r�pertoire et l'analyse des fautes. La fresque de ce drame humain �voque l'�volution des tactiques psychologiques des confesseurs, celle de la tension entre le probabilisme, o� toute �valuation se fait dans un scrupule parfois soup�onn� de laxisme, et le rigorisme d'une morale claire, du sentiment qu'on a des p�ch�s et de leur degr� de gravit�, notion aussi essentielle et aussi actuelle que la circonstance att�nuante.

J. Delumeau nous a habitu�s � ce va-et-vient tout en finesse de l'anthropologue qui observe sans prendre parti, qui ne s'inqui�te pas de situer sa r�flexion historique � la fronti�re de la psychanalyse. Pourtant, ce court ouvrage sait encore surprendre par la clart� du langage, par la rigueur dans l'investigation savante, par la perspicacit� lumineuse des synth�ses.

On prolongera avec int�r�t cette enqu�te historique par une enqu�te litt�raire telle que la conduit Bertrand de Margerie � travers les �crits de Chateaubriand, Lamartine, Alfred de Vigny, Verlaine, Huysmans, Claudel, Fran�ois de Sales, Bossuet (Du confessionnal en litt�rature, �ditions Saint-Paul, 1989, 248p., 145 F)

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Majid Fakhry

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Histoire de la philosophie islamique

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Le Cerf

1989, 418p., 250 F

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Dans un ouvrage hautement idiosyncratique mais fort stimulant qui, sous le m�me titre que celui-ci, fut publi� il y a� vingt�-cinq ans, H. Corbin soulignait que "le concept de philosophie islamique ne peut �tre limit� au concept longtemps traditionnel dans nos manuels". "il est radicalement faux", �crivait-il, que la m�ditation philosophique en Islam" ait �t� close avec la mort d'Averro�s". De l� proc�dait son souci de faire largement place au soufisme, d'une part, � des penseurs iraniens peu connus ou inconnus en Occident, d'autre part. Sans doute, comme le note l'auteur du pr�sent livre, Corbin soulignait-il � l'exc�s "l'�l�ment shiite", pour lequel il �prouvait une fascination notoire. Du moins ouvrait-il, avec des effets fort salubres, des fen�tres trop longtemps closes. Bien qu'il fasse des concessions, dont personne ne peut plus aujourd'hui se dispenser, � cette perspective �largie (vingt pages sur les "d�veloppements postavicienniens" : Suhraward�, Mull� Sadr� ; vingt-deux pages sur le soufisme...), il est manifeste que M. Fakhry demeure attach� � une conception qui identifie grosso modo la philosophie islamique � la falsafa, c'est-�-dire aux seuls auteurs musulmans qui se pr�sentent comme h�ritiers de la pens�e grecque.

Les raccourcis qu'impose le projet d'une synth�se embrassant - sous la plume d'un auteur unique dont l'information est in�vitablement in�gale treize si�cles d'une riche tradition sp�culative excusent, certes, le caract�re sommaire de telle ou telle formulation. Mais on a souvent l'impression que, sur les sujets qui l'int�ressent le moins, M. Fakhry se contente de r�p�ter sans examen des clich�s anciens que des recherches plus r�centes ont mis � mal. Exp�dier en dix lignes Ibn Masarra en s'appuyant sur les extrapolations hasardeuses d'Asin Palacios n'est gu�re s�rieux : on s'�tonne de voir ignor�s l'article de S. M. Stern, qui a d�nonc� la fragilit� de la th�se du grand orientaliste espagnol et les textes d'Ibn Masarra �dit�s en Libye par le Dr Muhammad Kam�l Ibr�h�m Jaafar.

Le chapitres sur les "Fr�res de la Puret�", s'il est plus solide, aurait d� faire r�f�rence aux travaux d'Y. Marquet et d'I. R. Netton (qui ne sont pas d'accord entre eux, et sur l'un et l'autre desquels nous avons des r�serves, mais qui m�ritent discussion). Zaehner n'a pas "d�montr� l'influence hindoue" sur Bist�m� de fa�on indiscutable" : ses arguments, comme ceux de n'importe quel chercheur, sont contestables et contest�s. Tr�s contestable et tr�s contest�e aussi est l'attribution � divers soufis de tendances "panth�istes" : cette interpr�tation grossi�rement simplificatrice, qui ne surprendrait pas chez un vulgarisateur, devrait c�der la place, dans le travail d'un sp�cialiste, � des sch�mas plus nuanc�s. L'expos� sur Ibn Arab� semble, pour l'essentiel, bas� sur la th�se, bien d�pass�e aujourd'hui, d'Afifi et, s'il fait un renvoi � Corbin, ne mentionne m�me pas Izutsu.

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Au d�but de ce si�cle, T. J. de Boer pouvait encore se risquer � �crire une Geschichte der Philoosphie im Islam. Bien que �M.�Fakhry, dans son introduction, �carte cette objection, la multiplication des recherches et des �ditions critiques ou traductions de textes int�ressant l'histoire de la philosophie islamique, stricto sensu ou lato sensus, condamne d�sormais, si regrettable que cela soit, toute tentative individuelle visant � en donner un panorama rigoureux et �quilibr�. Utile aux d�butants pour qu'ils balisent tant bien que mal cette terra incognita qu'est � leurs yeux la pens�e de l'islam, et qui appr�cieront la pr�sence d'un index dont les �diteurs fran�ais nous privent trop souvent, cet ouvrage, comme le Baedeker ou le Guide Michelin, est de ceux qu'apr�s lecture on doit laisser chez soi pour entrer, les mains nues, dans le paysage.

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Robert Legros

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L'Id�e d'humanit�

Introduction � la ph�nom�nologie

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Grasset, col. Le coll�ge de la philosophie

1990, 280p., 120 F

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Il n'est pas courant de pr�senter la ph�nom�nologie par une introduction tocquevillienne. C'est pourtant le pari tent�, et tenu, par R. Legros dans cet essai, qui cherche � montrer que la ph�nom�nologie fournit les outils th�oriques qui permettent de d�passer l'opposition moderne entre le romantisme et les Lumi�res.

De la pens�e des Lumi�res, nous h�ritons l'id�e d'une unit� de l'humanit�, obtenue par l'arrachement de l'homme � toutes les traditions particuli�res qui l'ali�nent Cette humanit� est celle du sujet individuel, raisonnable, cart�sien, Contre elle, le romantisme a fait valoir qu'il ne saurait y avoir d'humanit� que nourrie de la particularit� d'une tradition, et que l'homme des Lumi�res n'est qu'une abstraction. C'est ici qu'intervient Tocqueville, puisqu'il montre que la d�mocratie moderne correspond � l'av�nement de l'homme des Lumi�res, � l'incarnation empirique du sujet cart�sien. Mais la d�mocratie se paie aussi de l'ali�nation de l'individu par l'isolement et l'agr�gation en masse, qui croissent tous deux de pair. La force de Tocqueville est d'avoir d�montr� que Lumi�res et romantisme sont tous deux vrais.

Comment d�s lors penser l'homme pour tenir ensemble la force de l'arrachement qui le constitue en sujet libre et l'appartenance dont il provient ? Aux yeux de R. Legros, la ph�nom�nologie permet d'�laborer une telle anthropologie. Il s'appuie successivement sur Husserl, qui repr�sente pour ainsi dire une version ph�nom�nologique de la pens�e des Lumi�res, et sur Heidegger, qui en constituerait le p�le romantique. Mais c'est chez Hannah Arendt qu'il pense pouvoir d�couvrir la possibilit� de penser � la fois la libert� et l'appartenance, le sujet et sont �tre-au-monde. En ce sens, cette introduction � la ph�nom�nologie est aussi une lumineuse introduction � la pens�e politique.

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1789 Cahiers de dol�ance des femmes et autres textes.

Introduction de Paule-Marie Duhet,

pr�face de Madeleine Reb�rioux, des femmes, 219 p., 95 F

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Cet ouvrage fait le point sur les revendications des femmes durant la p�riode de la r�volution fran�aise de 1789. Tout d'abord on n'y rencontre pas que des h�ro�nes comme dans tant d'autres �tudes, ensuite il est tr�s vite permis de saisir combien les femmes ont d� d�fendre pied � pied la libert� et l'�galit�, la leur. Il leur faudra protester longuement avant de voir leurs droits reconnus par la Constitution.

L'Assembl�e constituante de d�cembre 1789 d�cide que personne ne peut �tre refus� � des fonctions publiques civiles ou militaires. L'�galit� de droit est accord� aux protestants et � tous les non-catholiques, hors les juifs. Les com�diens et les bourreaux se voient r�int�gr�s de plein droit dans la Nation, mais ni les femme ni les juifs, ni les esclaves des colonies, ni les femmes.

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Christophe Dejours,

Recherches psychanalytiques sur le corps : r�pression et subversion en psychosomatique.

Payot, Sciences de l'homme, 1989, 182 p., 110 F

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Cet ouvrage se r�f�re abondamment aux travaux de l'�cole psychosomatique de Paris et approfondit la notion freudienne de subversion libidinale. Ce qui repr�sente la tension de l'individu pour s'affranchir du biologique, quand une r�pression de pulsion se traduit par une somatisation. Dejours va s'appliquer � dresser une sorte de cartographie de la r�pression pulsionnelle et mettre les maladies en relation avec elle. Ainsi s'esquisse une ontogen�se d'un genre particulier. Celle d'une construction d'un corps �rotique � partir du corps physiologique. La question de la parole du corps est alors introduite mais l'auteur la signale comme particuli�rement insaisissable. L'auteur reste frileusement dans la ligne de la pens�e freudienne con�ue ici comme la pointe de l'art. Sont ignor�s tous les travaux ant�rieurs sur le corps et qui certaines �coles - dans le courant gelstatiste ou bio�nerg�tiste, dans la doctrine chamanique, dans l'acupuncture... - ont enrichi notre connaissance de notions importantes comme celle de diff�renciation des corps. Ce qui revient � dire que le corps n'existe pas en tant que ce que nous en connaissons mais comme une multiplicit� qui reste � explorer avec les instruments de la science. Ignorant m�me le Yoga, l'auteur nous fait une d�monstration �clatante de l'h�g�monisme de la pens�e freudienne qui s'affirme chaque jour un peu plus comme une sorte d'id�ologie dominante, s�re d'elle-m�me et inconsciente qu'elle tisse elle-m�me la trame de sa d�cadence.

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Fernand Meyer

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Gso-ba riq-pa

Le syst�me m�dical tib�tain

Presses du C. N. R. S. , col plus

1988, 236 p., 85 F

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Lecture tr�s enrichissante que celle de ce livre document� o� l'auteur nous entra�ne d'abord dans une r�flexion �pist�mologique � propos de l'approche des m�decines traditionnelles et de la tib�taine en particulier. Il d�crit ensuite quel a �t� son cheminement propre de m�decin interniste occidental, invit� � suivre l'enseignement d'un m�decin au N�pal, apprenant le tib�tain et �tudiant ainsi la litt�rature sp�cialis�e. Aussi n'est-on pas �tonn� que son analyse de la m�decine tib�taine se fasse "de l'int�rieur" et soit fond�e sur de nombreuses traductions originales de textes tib�tains toujours accompagn�es de commentaires. Embryologie, anatomie, physiologie, physiopathologie, s�miologie, nosologie, diagnostic et m�thodes th�rapeutiques sont successivement pr�sent�s en r�f�rence aux traditions indiennes et chinoises. L'originalit� et la complexit� du syncr�tisme que la m�decine tib�taine a op�r� par rapport aux connaissances venues de ses deux voisins sont habilement r�v�l�es.

Un esprit critique li� � une attitude g�n�reuse, une approche � la fois d'�rudit et d'homme de terrain ont conduit � la r�daction d'un livre qui fait d�j� r�f�rence.

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Jean-Pierre Vernant

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L'individu, la mort, l'amour.

soi-m�me et l'autre en Gr�ce ancienne

Gallimard, col. Bibl. des histoires

1989, 252p., 92F

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J-P. Vernant est de ces universitaires qui fascinent tant les m�dias � l'heure actuelle. Il est le repr�sentant type du chercheur qui semble ouvrir � son public des horizons fantastiques. Son dernier ouvrage groupe neuf articles parus de 1979 � 1989 et une �tude in�dite. Les sept premiers essais parlent de la mort en Gr�ce. C'est ce th�me qui assure l'homog�n�it� de l'ouvrage en d�pit de l'apparente disparit�.

La mort grecque est au c�ur du livre, avec ses deux visages. La � belle mort �, choisie et assum�e par le h�ros hom�rique, lui conf�re, par la vertu du chant, une gloire immortelle, et l'inscrit � dans la trame permanente d'une tradition que chaque g�n�ration doit apprendre et faire sienne pour acc�der pleinement, par la culture, � l'existence sociale �. C'est la mort transformante, transfigurante, celle que chacun esp�re pour soi.

Cette si � belle mort � est porteuse d'un syst�me de valeurs - beaut�, jeunesse, courage - que la m�moire sociale, par le chant et la st�le,� � tente d'implanter dans l'absolu pour...(se) mettre � l'abri du temps et de la mort �. La mort noire, elle, est du c�t� de l'indicible, pure b�ance, oubli, an�antissement, confusion et chaos. C'est la mort cruelle, qui prend souvent figure f�minine (Gorg�, K�re, Sir�nes, Harpyes, Sphynges). De ce point de vue J-P. V. contribue � une mise au net des aspects du f�minin. Celui qui sait combien nous sommes ici face aux productions d'un imaginaire masculin, sait aussi distinguer les figures aux f�minins - donc des projections - des visages de femmes prot�iformes. Peut-�tre, J-P. V. reste-il trop souvent elliptique en cette mati�re ?

Un autre trait important pourra retenir notre attention, c'est l'�trange alliance de l'�pop�e et de la po�sie lyrique, les accointances de la guerre avec la s�duction et le combat amoureux. Ici encore la mort para�t bel et bien la compagne invisible, myst�rieuse et fascinante d'Eros. Mariage �trange qui ne se teinte que de nos meurtrissures humaines.

C'est encore de mort qu'indirectement il s'agit lorsque J-P. Vernant, s'interrogeant sur cette �tranget�: le corps des dieux, ce corps immortel, rep�re le jeu de similitudes et de contrastes entre le sous-corps des hommes, apparent et obscur, vou� � l'impermanence et � la mort, et sur le corps des dieux, invisible et �clatant, n�cessaire support d'un syst�me polyth�iste qui a refus� le chaos pour placer la perfection du c�t� d'un cosmos diff�renci�. Les trois derniers essais analysent l'identit� grecque � travers le culte du H�ros, ses jeux de multiplications et de divisions; � travers l'�ducation spartiate qui, par une exp�rience de la honte, am�ne le jeune Lac�d�monien � choisir l'honneur; le dernier article montre comment la notion grecque d'individu s'est form�e non pas, comme en Inde, en dehors du monde et contre lui, mais bien dans le monde et � l'int�rieur de la cit�.On continue de s'interroger sur la possibilit� et les modalit�s d'une anthropologie des soci�t�s mortes, en particuliers de celles qu'on atteint principalement par des textes litt�raires.� Est-ce une des raisons pour lesquelles la Gr�ce que l'auteur nous donne � voir est si � bien ajust�e � jusque dans ses dysharmonies et ses stridences, et comme pr�structur�e?

Cl. L�vi-Strauss l'avait sugg�r�. A la lecture de cette immense panorama, on se laisse prendre au vertige des synth�ses superbes. La Gr�ce de J-P. Vernant ne peut laisser personne indiff�rent.

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Michel Paty

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La mati�re d�rob�e.

L'appropriation critique de l'objet

de la physique contemporaine

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On ne peut que saluer avec beaucoup d'int�r�t un livre qui constitue, �tant donn� l'"�tat d�courageant de l'�dition fran�aise" dans le domaine de l'histoire et de l'�pist�mologie de la physique contemporaine, l'unes des rares tentatives pour appr�cier de mani�re r�ellement inform�e la signification philosophique des th�ories physiques actuelles. De ce poit de vue,M. Paty s'engage dans le chemin ouvert par B. d'Espagnat, m�me si son orientation y est tout � fait diff�rente. C'est un chemin qui aboutit au contraire de la d�sinvolture, � laquelle il faut bien dire� que l'extr�me difficult� de la question trait�e conduit souvent aussi bien les physiciens que les �pist�mologues.

Aucune trace de pr�cipitation ici: il s'agit plut�t d'"envisager les probl�mes importants de la physique contemporaine de l'int�rieur", c'est � dire de montrer leur gen�se et leurs implications, afin de "d�couvrir en quoi les probl�mes de la science contemporaine sont des probl�mes philosophiques". Le r�sultat est un livre consid�rable, � la fois par son information et par l'effort constant qui est fait pour expliciter la nature des arguments et des raisonnements. Il peut donc susciter le d�saccord mais seulement sur le fondement d'une discussion attentive. Par exemple: l'analyse du concept d'atome et de la notion d'�l�mentarit� appara�t dans une tension entre deux affirmations contraires, d'un c�t� celle de la permanence de l'intuition "mat�rialiste" de l'atome, de l'autre celle de la distorsion historique du contenu du concept. Confront� au m�me �tonnement, Cassirer concluait, dans son livre de 1936, au caract�re purement fonctionnel de l'hypoth�se atomique, comme d'ailleurs d�j� Boltzmann.

On pourrait par cons�quent objecter � M. Paty qu'il hypostasie "trop" lorsqu'il parle d'un passage de l'hypoth�se � l'existence, ou de la "r�alit� d�montr�e" des atomes. Mais de telles critiques ne prennent sens que lorsque la connaissance historique du d�veloppement de la physique contemporaine fait l'objet de discussions pr�cises dans une communaut� intellectuelle donn�e. Sur chaque moment de l'�volution de la th�orie quantique, il existe actuellement des interpr�tations divergentes, difficiles � appr�cier si l'on ne dispose pas des textes originaux. De ce point de vue, l'ambition du livre de Paty-qui est de voir discut�es ses th�ses philosophiques fondamentales-est en avance sur l'�tat pr�sent de la situation, et l'on souhaite encore plus, en le lisant, assister au changement de cette derni�re.

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RETOUR VERS LA D�ESSE

Une initiation pour les femmes du IIIe Mill�naire

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Par Sylvia Brinton Perera

Traduit de l'am�ricain par Franc,oise Robert

Pr�face de Pierre Soli�

Editions: SEVEYRAT,

Format: 14,5 x 24 - broch� - 176 p.-130 F

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Retour vers le futur... Retour vers la d�esse... un clin d'�il au septi�me art pour le titre de ce livre qui nous entra�ne, lui aussi dans un voyage � travers le temps retrouv�.

Mais l� s'arr�te la comparaison, car ce livre va bien au-del� du simple divertissement...

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En effet, mettant en correspondance les textes anciens et les exp�riences v�cues, et les r�ves de ses patientes, Sylvia Brinton Perera a explor�, du point de vue de la psychologie jungienne, le mythe de la grande d�esse sum�rienne Inanna/lshtar, d�esse du Ciel et de la Terre, et son voyage dans le monde souterrain, � la rencontre de la d�esse Ereshkigal, sa s�ur obscure.

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Cette descente aux enfers sur les traces de la d�esse, ce voyage initiatique, Sylvia Brinton Perera l'a fait, pour elle m�me d'abord, accompagnant ses patientes ensuite. Et elle en a chaque fois constat� les bienfaits.

Car les femmes d'aujourd'hui, devenues des "filles du p�re", se sont tellement conform�es, pour r�ussir, ou simplement pour survivre, aux valeurs "masculines", qu'elles se sont souvent cruellement amput�es de leur propre �nergie f�minine, que symbolise Inanna. Et c'est au c�ur des profondeurs chtonniennes r�prim�es, qu'elles pourront retrouver la pl�nitude de cette force f�minine, active et vuln�rable, terrible et fertile, enracin�e et r�ceptive, qui n'est pas concern�e par le bien et le mal, ou par l'�tablissement de cat�gories abstraites, mais par la vie.

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Ce livre n'est pas seulement un manifeste pour un "f�minisme plus f�minin", c'est une contribution � la conscience qui nous r�concilie avec la soi disant "passivit�" f�minine tant d�cri�e, qui est en r�alit� r�ceptivit�: v�cue positivement, elle poss�de un immense pouvoir de transformation et de cr�ativit�.

Ce livre s'adresse donc �galement aux hommes, non seulement pour comprendre et appr�cier leurs compagnes, mais pour y retrouver, eux aussi, leur f�minin, qu'ils ont bien souvent banni, ou d�figur�, pi�g�s par la rigidit� de leur propre syst�me.

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Notre IlIe Mill�naire verra‑t‑il enfin, face � la n�cessit� vitale de changer � laquelle il se trouve confront�, I'aboutissement des efforts des femmes pour faire reconna�tre leur identit� et leurs valeurs profondes, en exil depuis 5000 ans?

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Sylvia Brinton Perera est Analyste jungien et enseigne au C. G. Jung Training Center de New‑York. Elle a publi� en 1986 "The Scapegoat Compex: Toward a MytholoRy of Shadow and Guilt".

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