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Recherche – Exploration |
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Ritm 'Ocor GESTES, MUSIQUES, RYTHMES ET PERCUSSIONS
Illel Kieser Ibn 'l Baz Travail du souffle, des postures et de l'assise corporelle
La progression permet l'accès à toutes les sensations du corps : Il est ensuite question de puiser dans les images intérieures l'écho des sensations venant de l'extérieur ; nous cherchons l'appui au sol, les pieds captent les vibrations de la terre : le corps se place dans la position la plus souple et la plus équilibrée. Dans l'espace inoccupé, les mains cherchent des appuis. L'inconnu se présente, chacun en explore les recoins, soutenu par le percussionniste et les musiciens. Du fond de chacun naît alors une vibration, un son imperceptible. Il s'étend, baignant la conscience d'un halo léger. Un chant s'élève, un mouvement, une danse s'élaborent, emportant l'être, doucement, sensuellement, loin des lourdeurs quotidiennes. Vers des horizons étranges, terres intérieures que l'on explore enfin sans crainte. Au loin, la percussion la musique et les chants deviennent des appels. Quand revient la vague du quotidien, une trace demeure, comme un lit nouveau dans lequel se glisserait un regard différent.
Cet atelier complète parfaitement toute forme d'entraînement corporel ou de travail sur soi. De nombreux danseurs. des comédiens ont trouvé dans Ritm'ocor un moyen d'élargir leur champ d'exploration. Ceux qui cherchent à exercer leur acuité sensitive, trouveront ici un moyen d'intégrer la perception qu'ils ont de leurs postures, de maîtriser leur souffle et de gérer au mieux leurs énergies.
ARGUMENTAIRERitm'ocor n'est pas un « travail » corporel, même si le corps y prend en apparence une grande part. Dans Ritm'ocor. il s'agit de retrouver la dynamique fondamentale des rythmes personnels. D'abord s'isoler des sensations de surface, c'est à cela que servent ici les percussions, créer une espèce de saturation des perceptions externes, un mur sur lequel la conscience rebondit. Vient alors l'intériorisation. Puis la captation en soi d'un son viscéral, un volume sonore, vibrant, enfoui au fond de soi et porteur d'un mouvement. Il s'agit alors de laisser ce mouvement s'emparer de soi ‑ le corps est comme une monture ‑ et le laisser si possible s'épanouir jusqu'au bout. La vibration se module, se vocalise. Un chant, un cri, un gémissement peut alors surgir de la gorge. La première exploration de l'espace se fait ici grâce aux mains et au regard. Puis le tronc, l'arc-bouté, et la reptation. Toutes ces composantes aboutissent à la position verticale. La visée vers un but (souvent avec les mains qui se tendent), fait naître la marche. Cela devient un jeu d'équilibre perpétuel. Ensuite vient la rencontre avec l'autre: cette alliance ‑ positive ou négative ‑ introduit une direction. Un mouvement rythmé s’élabore, l’esquisse d’une danse, quelque chose se coule en harmonie – qui n’est pas forcément du goût de la conscience, si soucieuse de beau et de bien, ‑ avec le mouvement de l'autre.
Il'LBaz, créateur de la méthode et meneur de jeu, est anthropologue, comédien, metteur en scène, il a mis au point différentes techniques de centration et de « travail sur soi », faisant du geste intérieur une écriture, un acte de création et de communication.
« J'ai d'abord dirigé des comédiens et des chanteurs. Cette approche leur a souvent permis de mieux se situer dans l'espace mais aussi de repérer leur façon de mouvoir leur corps. Les danseurs, quant à eux, peuvent élargir la perception qu'ils ont de nombreux genres de danses, passer de l'un à l'autre plus facilement. La capacité à initier le geste depuis l'intérieur permet de créer, dans leur style, des mouvements et une gestuelle enrichissante. Je travaille essentiellement les appuis dans l'espace, avec les mains. C'est une expérience fascinante de découvrir un jour que l'on peut s'appuyer dans l'espace. Les sportifs le savent parfaitement, mais les nécessités de la compétition les oblige à réduire leur champ d'exploration. Leur gestuelle est sommaire. On gagne cependant beaucoup à les observer. Dans chaque sport les gestes sont les mêmes d'un individu à l'autre, pauvres mais puissamment efficaces, car la visée est la même pour tous. La qualité du geste est perdue au profit de son efficacité. Mais ce sont des gestes naturels, spontanés, épurés, poussés à l'extrême. Et la sélection s'opère sur ces bases. Garder ceux qui, dans un sport, ont une morphologie apte à créer les gestes requis.
Dans Ritm'ocor la finalité change mais il s'agit par différents moyens de se mettre en situation de créer un geste ou un groupe de gestes spontanés dont la réalisation procure une sorte de plénitude intérieure. D'où l'importance d'une mise en situation de limite, mais sans fatigue, sans torsions, sans douleurs, car si la personne doit lutter contre l'apparition de la souffrance, la spontanéité créatrice est perdue au profit de réactions de défenses, en tous genres.
De ce point de vue l'animation est essentielle. La musique, les rythmes, les claquements de mains, l'accompagnement des autres, etc. facilitent une sorte de dérive vers une ambiance de tension créatrice. Ce n'est pas une détente, c'est plutôt un élan.
Dans ce que d'aucuns appellent transe, on suppose que la conscience est abolie et que l'on change d'état, En fait. l'Occidental pêche par ethnocentrisme car il lui est impossible d'imaginer que plusieurs formes de conscience puissent cohabiter dans le même temps et dans le même espace. De même est-il difficile d'envisager que l'on puisse jouer sur ces différentes formes de conscience comme sur le clavier d'un instrument de musique, composer avec, créer des phrases, des mélodies, des histoires abstraites ou figuratives à l'aide d'un langage codé, mais accessible.
La transe est perçue comme passage à un autre monde, non comme la maîtrise d'un instrument de communication par le geste, la voix et d'autres supports. Tout se passe comme si l'individu en transe n'était pas lui-même.
Or, dans toutes les transes que j'ai pratiquées, depuis celles qui interviennent dans les grandes fêtes africaines, les danses sacrées des confréries musulmanes, les litanies des guérisseurs péruviens, les gestes endiablés des princesses vaudous, etc. je retiens que, à aucun moment, la conscience vigile, celle qui permet de parler communément à l'autre, la conscience commune, dirais-je, n'est abolie. Même si le corps semble ne plus répondre aux sollicitations de cette conscience, toujours demeure une instance consciente qui observe et, parfois, mémorise.
Dans Ritm'ocor, il est justement question de jouer en permanence sur la polyvalence du clavier des consciences. Passer de l'une à l'autre devient un jeu. L'important étant, au début de passer le seuil des jugements, des idées préconçues, car il est vrai que la conscience commune change. mais elle ne disparaît pas. Parfois, ce n'est pas la peur qui fige la personne, c'est la crainte imbécile du ridicule. Comme si nous étions pollués par la présence d'une instance docte, mesurée et sans fantaisie, sorte de gardien puritain et sans grâce.
Par la puissance de ce jeu, surgissent des affects, des images et des mouvements porteurs d'une cohérence qui nous échappe au début. Puis, à l'examen attentif, nous devenons sensible à l'apparition de lignes de forces, de dessins qui forment comme des peintures dans l'espace intérieur. Ces figures parlent et dialoguent avec nous. Surgissant du fond de nous-même, d'endroits inconnus, nous en découvrons peu à peu la beauté fascinante.
C'est ainsi que l'on peut espérer retrouver ce mouvement naturel, fondamental, et en faire une écriture. La matière se crée dans l'espace, par le jeu des images. Cela ne se fait pas forcément en un seul jour, vaincre nos réticences normatives n'est pas chose facile. Mais la découverte progressive des ces espaces d'aventure intérieure finit par exercer une attirance quasiment aussi grande que celle que l'espace des rêves exerce sur la conscience. » Illel Kieser Ibn ‘l Baz |
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