Livre premier : La Farfantelle
Suzanne-Ren�e-Marcelle, sa m�re, na�t � Dijon en septembre 1904. Deuxi�me d'une fratrie de quatre filles qui �grainent leur enfance dor�e dans une demeure cossue de la rue Ferdinand de Lesseps, Suzanne est issue de Valentine Guillaumot et du sieur Emmanuel [de] Mazeran, noble famille charentaise qui, par l�chet� sans doute, supprima sa particule � la R�volution. Quant aux Guillaumot, ses recherches font remonter Valentine � une branche b�tarde des rois de Bavi�re. Do s'enorgueillit d'avoir pour anc�tre Louis II, cet esth�te dilettante g�nial et non ce malade mental que l'histoire se compla�t � d�crire. Ainsi par la voie maternelle a-t-elle du sang bleu. Quelle belle jambe cela lui fait ! Professeur de philosophie, Emmanuel appartient � la caste hautement bourgeoise des notables dijonnais du corps enseignant. Il dirige une institution priv�e de jeunes filles de bonnes familles. Naturellement, Valentine ne travaille pas; elle �dresse� ses quatre filles, aid�e de nurses anglaises comme l'exige le bon ton dans ce milieu. Juliette, l'a�n�e, deviendra femme rac�e, dot�e de cette classe inn�e distribu�e si parcimonieusement. Belle, comme Valentine, s'il faut en croire les rares photographies montrant cette derni�re en chignon d'�poque (photo de Valentine en chignon), Juliette �pouse Andr� F�licien, administrateur des colonies, dont le pass� ne semble pas toujours avoir �t� tr�s catholique; il se serait entre autres �occup� de camps de prisonniers indochinois pendant cette sale guerre que fit la France � l'Indochine avant qu'elle ne critique celle que firent les Am�ricains au Vi�t Nam ! On le retrouve en Oubangui-Chari o� naissent ses enfants Mich�le et Jean-Pierre. Il est tu� dans les ann�es cinquante, le thorax d�fonc� par la charge d'un buffle qu'il n'a pas �t� capable de tirer proprement au cours d'une chasse... Ren�e, pu�n�e discr�te et falote, �pousera Jo Noirbonheur, un colon belge - et de deux ! - qui l'emm�ne vivre au Maroc puis au Congo. Ils auront trois enfants : Chantal, Alain et Jeanne ou Jeannette, de trois mois la cadette de Do[minique]. Genevi�ve-Ginette, la benjamine, est la plus jolie, la plus fine, la plus marginale aussi, en d�pit de son hypocrisie � vivre dans la norme chr�tienne. Ginette, � qui Do a toujours connu des cheveux blancs et qui ne se mariera jamais, r�pond un jour � une petite annonce de colons - d�cid�ment ! - install�s � Ceylan et cherchant une gouvernante pour leurs enfants. Naturellement rac�e elle aussi, elle fait tourner la t�te � son patron Thuillier. D�s son retour en France, elle accouche � Marseille d'Olivier, scorpion de deux ans a�n� de Dominique, qui deviendra un grand journaliste. Deux mois apr�s la naissance de son fils naturel, trop catholique pour divorcer, Thuillier se jette sous le m�tropolitain. Pour en finir avec la branche maternelle, citons encore le fr�re du grand-p�re Emmanuel, L�once, qui poss�de des orangeraies au Maroc, pr�s de F�s, et leur soeur Gabrielle, la tante Gaby, femme tr�s pieuse et tr�s g�n�reuse de l'h�ritage de son amant, un richissime armateur grec. Avec cette manne de l'amour, elle fonde un sanatorium en Suisse et un pr�ventorium h�liomarin � Cannes o� elle vit et o� les S. vont parfois la visiter. Valentine a une soeur, Andr�e, mari�e � l'oncle Paul, que Do ne conna�tra qu'� Dijon, adolescente. Suzanne aussi est belle, bien que ses traits fins durcissent son visage. Petite, elle ne joue pas. Elle trouve son seul plaisir dans la lecture Elle passe son brevet, ce qui alors est une belle avanc�e pour une fille. Enfant terrible du quarteron Mazeran, � quatorze ans, elle renie la foi catholique; � 17 ans, elle fr�quente les cours du soir de l'�cole des Beaux-Arts, section gravure. Ce sont les ann�es charleston, la mode nouvelle des cheveux courts, et elle est la premi�re jeune fille de Dijon � se les couper. Quel scandale ! Et si encore elle s'en tenait l� ! Mais non contente de sa coupe � la gar�onne, Suzanne pose nue � l'Acad�mie ! Et ce n'est pas tout ! Elle va �galement, comble de l'ind�cence, nager dans l'Ouche, en compagnie de gar�ons ! Aux Beaux-Arts, elle rencontre Albert qui participe lui aussi aux exp�ditions des Bains d'Ouche. C'est � l'occasion de ces cours du soir, Albert suit la classe de peinture, que les parents de Dominique font connaissance, bien que leurs milieux d'origine si divergeants ne les aient nullement pr�destin�s � se trouver un jour sur le m�me chemin.
Albert-Raymond-Justin S. est fils d'un petit instituteur du P�rigord, clerc de mairie, puis adjoint au maire du bled de Couchey sur la route des Grands Crus entre Dijon et Beaune; un petit socialo sans envergure, et pauvre de surcro�t. Do se souvient d'un vieillard d�charn�, dess�ch�, aux joues r�peuses de poils mal ras�s. Elle aimait passer ses dimanches en sa compagnie, aller lui acheter son lait dans le bidon de laiton � la ferme voisine, lait parfum� de fleurs des pr�s, de tr�fles et de sainfoin... Joseph �pouse Elena Stadler, fille des charcutiers des ducs de Constance, sur le lac du m�me nom, entre Suisse et Allemagne. Elena est une Suissesse de langue allemande, donc presque une Allemande, ce qui vaut pas mal de probl�mes � Albert pendant les deux guerres o� il est chass� des �coles, montr� du doigt, refus� de travail, lui, le fils d'une Allemande, le fils de l'ennemie ! Est-ce pour cette raison qu'il deviendra anarchiste - au sens �tymologique du terme -, fera de la r�sistance non violente et de la prison, m�nera une lutte acharn�e quoiqu'antimilitariste contre les fachos teutons et les collabos gaulois ? Elena meurt quand son fils a quinze ans. A la fa�on dont son p�re en parle, Do devine qu'il ne l'a gu�re aim�e... Joseph S. a une soeur, El�na bis repetita, la grand-tante El�na, cantatrice un triste jour priv�e de voix et de dents, et surtout �grenouille de b�nitier� ou �punaise de sacristie�. C'est une grande perche maigrichonne, toujours v�tue de noir, affubl�e de bibis �triqu�s en paille et � voilette, et pourvue d'un dentier qui, lorsqu'elle l'�te le soir et le pose dans un verre d'eau, transforme sa bouche en ventouse. Voil� donc, grosso modo, la galerie d'anc�tres de notre h�ro�ne.
Grand tapage m�diatique est men� � l'Elys�e autour de la signature des accords de paix de Dayton : courbettes protocolaires, poign�es de mains dont la spontan�it� est d�mentie par la mine renfrogn�e des faci�s, round diplomatique malsain des grands chefs sioux de ce monde qui se frottent la panse, chacun bien persuad� d'avoir �t� le seul ou le meilleur r�solveur de l'�quation bosniaque et chacun revendiquant en chiffonnier bien �duqu� la primaut� des interventions et le m�rite de cette �paix�. Et comment se fait-il que l'on persiste � donner la parole � la propagande tchetnique de d�stabilisation et � des personnages qui portent aux nues un criminel notoire nomm� Mladitch ? � des interlocuteurs qui pr�tendent encore, � l'encontre de l'histoire, que � le Kosovo est le berceau de la Serbie � et que les Kosovari y ont �t� d�vers�s manu militari par l'envahisseur ottoman; qu'il faut � �radiquer les s�quelles du colonialisme turc �, c'est-�-dire �liminer tous ceux dont les anc�tres, au quinzi�me si�cle, ont opt� sous la menace mais sans grande conviction pour la religion musulmane; enfin, qui accusent les Slov�nes et les Croates d'avoir �tu� la Yougoslavie� en proclamant leur ind�pendance, affirmant qu'ils n'avaient aucune raison de le faire puisque les principaux dirigeants politiques et la majorit� des diplomates du gouvernement titiste �taient slov�nes ou croates. Comment l'agression serbe contre la Slov�nie, puis contre la Croatie, aurait-elle pu �tre motiv�e par le d�sir d'effacer les s�quelles ottomanes puisque Slov�nie et Croatie sont terres catholiques et n'ont pratiquement pas subi le joug turc ?
Le d�bat est ouvert sur le probl�me des Serbes de Sarajevo : on parle beaucoup de ces �Serbes� d'Ilidja, de Vogochtcha et autres p�riph�ries, venus de Serbie au d�but de cette guerre et qui refusent le trait� de paix et la �r�unification� de Sarajevo. Pourquoi ne parle-t-on pas de tous les Bosniaques orthodoxes et catholiques qui vivaient depuis des si�cles et ont continu� � vivre en harmonie pendant cette guerre, dans Sarajevo et ailleurs en Bosnie, avec leurs voisins, tout autant bosniaques qu'eux : musulmans, ath�es, juifs, slaves ou non ? Pourquoi passe-t-on sous silence que les hommes de ces familles serbes r�cemment arriv�s � Sarajevo sont ceux-l� m�mes qui ont constitu� les milices tchetniques de Mladitch et de Karadjitch et canard� Sarajevo, tuant aveugl�ment tout autant de musulmans que de catholiques ou d'orthodoxes ? Bien s�r que ces gens-l� se sentent dans l'obligation de partir, mais non parce que les Bosniaques se montreraient agressifs � leur encontre, mais parce qu'ils sont des envahisseurs � qui ont demande de restituer leurs biens mal acquis � ceux qu'ils ont vol�s. N'auront-ils donc pas � r�pondre des crimes perp�tr�s contre les civils de la capitale bosniaque ? Les Bosniaques ne leur ont jamais demand� de venir � Sarajevo, alors, qu'ils ne pr�tendent pas que les Bosniaques les �chassent de chez eux� et �qu'il n'est pas possible de vivre avec les musulmans� ! On devrait clairement dire, plut�t, que les victimes bosniaques pourront difficilement vivre � c�t� de leurs bourreaux d'hier et hors de leurs propres maisons envahies et pill�es. Comment pourrait-on avoir la paix avec ces gens-l� ? Et pourquoi les journalistes ne d�signent-ils toujours pas l'agresseur et mettent-ils toujours dans le m�me panier bourreaux et victimes, ne r�v�lant ainsi qu'une seule face des choses ou, ce qui revient au m�me, s'obstinant � en voiler l'autre face�? Est-ce l� le fait d'une volont� d�lib�r�e, ou celui d'une grande paresse devant l'�norme t�che d'avoir � tout expliquer aux gens ordinaires et apr�s tout trop b�tes pour comprendre ? ou n'est-ce l� tout simplement que le fait d'une incomp�tence flagrante ?
N� par hasard, en juin 1905, � Chalon-sur-Sa�ne, Albert commet, du temps des Beaux-Arts, une faute monumentale, r�par�e seulement vingt ans plus tard : il vient un beau jour, lui le prol�taire, lui l'ouve�rier, l'anarchiste, le socialo, demander la main de Suzanne en complet-veston-cravate et gants beurre frais ! Celle-ci l'envoie balader, terriblement d��ue, au grand soulagement du clan Mazeran qui voit d'un fort mauvais oeil leur fille se m�sallier avec un ouvrier. Le monde du travail se l'approprie d�s l'�ge de douze ans. Il d�bute � la Biscuiterie Pernot dont il badigeonne en cobalt les verri�res pentues du toit en dents de scie des ateliers, d'o� cette terrible peur du vide et ce vertige qu'il transmettra � sa fille. Un frisson d'horreur amus�e la secoue chaque fois qu'il raconte comment des rats se trouvaient broy�s dans la p�te � petits beurres ! Hummm... Elle y emprisonne en sandwich une belle couche de margarine Astra, trempe le tout dans son caf� au lait bien chaud du matin, et la friandise deux fois cuite fond dans le liquide brun, se d�composant en bouillie inf�me au fond du bol. D�lices des souvenirs proustiens en go�ts et en odeurs! � les bols du petit d�jeuner ! Puis Albert quitte Dijon apr�s avoir quitte Chalon, ville de Nic�phore Niepce, inventeur de la photographie. Il se retrouve aux usines Ford, d'abord peintre au pistolet des carcasses de voitures (et peintre � l'aquarelle des hauts fourneaux), puis contrema�tre, ayant fait preuve d'intelligence et d'une belle aptitude au commandement. Il travaille ensuite dans d'autres fabriques chimiques qui lui valent une p�ritonite : il est empoisonn� par les vapeurs des laques � la nitroglyc�rine. Bien avant la cirrhose alcoolique qui l'emporte � 61 ans, il a d�j� le foie esquint� par les effluves �thyliques des colorants. Dans les ann�es 36 du Front Populaire, il se met � �crire : sa vie � l'usine, sa vie � l'ombre des usines, la vie des ouvriers dans et hors des usines. On le publie en s�ries-feuilletons dans des revues mensuelles, et quelques romans sortent chez Grasset et dans la collection Nouvelle Revue Fran�aise, chez Gallimard : Nitro, Elie ou le Ford France 531, Les enfants poss�d�s, La peur sur les Marcs d'Or... Petit � petit, en parall�le, il bascule irr�versiblement dans le journalisme de reportage. c'est ainsi que, r�dacteur en chef du Journal de Barcelone, il couvre la guerre d'Espagne dans les rangs des brigades internationales o� il c�toie Tito. Il collabore � des journaux tels que Voil� ou D�tective. Il suit l'av�nement de Bourguiba en Tunisie, anime des �missions radiophoniques avec Marianne Oswald... Ainsi, en d�pit d'une trop br�ve scolarit�, il met en page sans forfanterie un infini savoir, r�dige dans un style parfait de concision, couche intelligemment sur le papier une connaissance in�narrable, affiche un caract�re entier... Au cours de la deuxi�me guerre, il prend en charge dans les Deux-S�vres des travailleurs r�fugi�s pour les soustraire au STO. Et pendant tout ce temps-l�, et toute sa vie durant, il ne cesse de croquer les hommes dans les trains, sur les champs de bataille et dans les cimeti�res de Catalogne, dans les usines et � leur ombre, les girls dans les coulisses des music-hall... Il pond ainsi une aquarelle par jour, t�t le matin, aussit�t pass�e sa crise d'asthme et d'expectorations quotidienne. Il est � l'origine d'une des premiers maisons de la culture, l'Universit� populaire de Boulogne-Billancourt. A Beaune, il cr�e sous l'Occupation un Coll�ge de la Pierre et un Mus�e du Vin o� son nom n'est nulle part cit�. Cr�ateur anonyme superbement oubli�... Vingt ans apr�s sa demande en gants beurre frais, Albert renouvelle son offre. Avec la b�n�diction de deux amis t�moins, c�l�brit�s de la litt�rature fran�aise, Jean Cassou et Henri Poulaille, il �pouse Suzanne en 1942, Mireille d�j� en route. Elle vient au monde le 4 juillet, dans l'appartement que Suzanne poss�de rue Friant, pr�s de la Porte d'Orl�ans. Puis les S. retournent s'installer en Bourgogne, tout d'abord � Beaune o� Albert, fin d�gustateur, conquiert la charge honorifique de Chevalier du Taste-vin. Il est tout � fait naturel que ce Bourguignon de hasard, aux papilles si d�licates qu'aucun cru n'a de secret pour elles, tienne des chroniques vineuses dans l'hebdomadaire sp�cialis� qu'est La journ�e vinicole de Montpellier, pour lequel la famille ira bient�t nicher � Aix-en-Provence. Pour l'instant, les voil� avec le b�b� Mireille � Beaune. C'est la guerre. Do ne va pas tarder � voir le jour, dans ce chaos invraisemblable.
Dominique �merge du ventre de sa m�re le 3 d�cembre 1944 � Nuits-Saint-Georges, � z�ro heure cinq du matin, dans une petite clinique minable. A court d'id�es, et parce que c'est dimanche, ses parents l'appellent Dominique, pr�nom qui, vite trop fastidieux � prononcer, deviendra Do, par paresse chez Suzanne, par tendresse chez son p�re. En ces jours de paix r�tablie, Beaune est frapp�e d'une grande mal�diction qui bouleverse � jamais cette petite famille pauvre de corniauds bourguignons �pargn�e par la guerre : une �pid�mie de poliomy�lite. Mireille a quatre ans, Do un et demi. Elle est le grand �chalas et Do le gros �l�phant, ou le gros patapouf. Bien portante en effet, Do a de bonnes joues et d�j� des pneus Michelin autour du ventre. Mireille boit la tasse dans la rivi�re de Beaune � l'eau contamin�e par le virus et reste paralys�e des deux jambes et du bassin. Puis, son �tat s'am�liorant, les s�quelles se limitent � une seule jambe, mais le mal est fait. Sur les photographies d'�poque, elle para�t mignonne et d�j� fillette, et Do toute ronde et grassouillette, mais Do est d�j� et sera toute sa vie �bien foutue, bien portante�, sans probl�mes donc... Et de l�, de cette diff�rence, de ce choix du destin, na�tront tous les maux de son existence. Contre la menace du fl�au, par son comportement irr�fl�chi de gros b�b� stupide, elle invente le vaccin anti-polio. Une �ponge, que Suzanne vient d'utiliser pour torcher le derri�re de la gamine incontinente en premi�re phase d'incubation, tra�ne sur la table, pleine de chocolat marron. Do mord avec d�lice dans la friandise offerte... Col�re de Suzanne, si prompte d�j� � se f�cher contre elle au lieu de s'inqui�ter d'abord, puis de dialoguer et d'expliquer. Il est vrai que pour Suzanne un enfant n'�tant qu'une �chose � dresser�, la petite fille est sans doute trop sotte pour comprendre ses paroles. Mais tralal�re, elle n'aura jamais la polio : sa gourmandise l'en immunise ! C'est la premi�re nique qu'elle leur fait, � sa m�chante de m�re et � sa jalouse de soeur ! Albert, quant � lui, est fou d'inqui�tude : une fille paralys�e, passe encore, mais les deux !
Do erre dans les rues �teintes de Dubrovnik, comme en Kotor grise apr�s le tremblement de terre. c'est d'une tristesse infinie. L'herbe pousse entre les dalles autrefois couleur de peau de jeune fille �pargn�e du soleil, les chats sauvages baguenaudent sur les pierres ternies par les lichens de l'abandon. Que sont devenues les femmes si fi�res de leur pas-de-porte et qui, chaque matin, � grand jet d'eau et force coups de brosse et de savon, faisaient reluire leur portion de rue-escalier ? O� sont les glycines bleues, les bougainvill�es violettes et les lauriers roses de sa cit� corsaire tant aim�e ? Vite, il lui faut sortir du cauchemar. Elle doit retourner l�-bas, revoir tous ses amis, [re]voyager au[x] pays de son c�ur ! En attendant, elle passe ses nuits � [re]�crire l'histoire de la Yougoslavie d'hier, � r�ver d'elle comme un homme songe � une belle femme perdue.
Pourquoi as-tu appris le serbocroate ? lui demandent ses amis.
Ils sont venus un jour de septembre, voici longtemps d�j�, colportant les parfums de leur pays, les chansons de leur pays, Yougoslavie. Ils sont venus, corps de roc et de sang, danser les ora dans les costumes de leur pays. Ils ont gagn� le Collier d'Or, le premier prix pour le folklore de leur pays, Yougoslavie. Un jour de septembre, ils sont repartis en lui chantant cette chanson : � Ce n'est qu'un au revoir mes fr�res, car nous nous reverrons... �. Elle les reverra, ses fr�res du Vlado Tasevski, lorsqu'elle ira dans leur pays... Mais la terre y aura trembl� et dans les ruines de Skopje auront p�ri quelques amis : le chanteur chiptar Redjep Zayazi et Rada la blonde... Et Frantss� bel estropi� n'a plus qu'une jambe pour danser...
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