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Les médias polluent...

Illel Kieser 'l Baz

Extrait d'un ouvrage à paraître.

Du procès des médias

La cible

Si l'équation : plus d'information = plus d'oubli, étonne ou dérange on se demande bien pourquoi. Faudrait-il que nous nous sentions concernés par tout ce qui se passe dans le monde ? En vertu de quel grand principe ? Si le citoyen se sent concerné par sa vie de quartier, il vote. Il se sent alors, légitimement responsable de sa vie sociale. Mais, en ce qui concerne la marche du monde, où et comment pourrions-nous manifester notre indignation et notre écœurement devant la barbarie qui inonde la planète d'un fleuve de sang et de larmes ? Parce que l'information que diffusent les médias couvre la terre entière, nos réflexes civiques se révèlent datant d'époques révolues et nous croirions volontiers que la planète n'est qu'une annexe de notre jardin. D'où cet ethnocentrisme aussi violent qu'inconscient, aussi autoritaire que naïf. Avons-nous vraiment envie de sortir du cadre étroit de nos villes et de nos petits quartiers pour nous lancer à l'assaut du monde, à l'instar des Révolutionnaires à jamais immortalisés sur les billets de 100 FF ? Je ne le crois pas. Le gel intellectuel et la frilosité créative nous ont déjà contaminé, figeant toute réaction dans le sel de l'immobilisme. Nous ne participons pas au désastre du monde, nous gémissons seulement sur l'émoi que celui-ci provoque en nous. Notre peine et notre détresse nous dérangent, c'est malheureusement tout ! Ces sentiments dérangent le bel ordonnancement de nos intérieurs. Ils font sale !
S'en prendre au médias, c'est s'offrir un bouc émissaire à bon compte, un moyen supplémentaire de démissionner. Le premier pas consisterait au moins à ne pas nier cette frilosité, nous pourrions alors - par un effort d'introversion - en chercher les causes intérieures et cesser de nous raccrocher aux explications des « spécialiste » du genre et qui ne le sont que pour eux-mêmes, dans l'espace étroit que dévoile leur pensée. Si les médias "fabriquent l'oubli", c'est qu'ils ne nous émeuvent pas. Il faut en convenir, on oublie ce qui ne concerne pas nos sens. C'est triste, terriblement affligeant, mais la barbarie du monde ne nous émeut pas. Elle trouble, le temps d'un flash d'information, l'espace doucereux de nos appartements.

Mais qu'un événement insignifiant à l'échelle planétaire se déroule dans la rue et nous voilà tous à la fenêtre, voire sur le pavé...[1] Prendre les journalistes pour cible n'a pas plus de sens. Dire qu'ils réduisent tout à leur jargon, qu'ils méprisent le public, etc. peut-il enrichir le débat, faire évoluer l'outil de diffusion de l'information ? On espère quoi au juste des médias ?
En fait, à travers ce procès général, nous avouons d'une manière ou d'une autre que nos démocraties disposent d'un instrument dont nous ne savons pas nous servir. Et ce n'est pas le seul, des outils plus récents comme les ordinateurs multimédias, les réseaux planétaires, etc. suscitent la même défiance. Nous finissons par nourrir à leur égard une sorte de fétichisme de très mauvais aloi qui peut déraper à tout moment. Leur attribuant des vertus qu'ils n'ont pas, nous les dotons d'une puissance qui demeure illusoire... Ce ne sont plus des outils destinés à rendre la vie domestique plus facile, ce sont des objets magiques et ceux qui les manipulent ne sont plus des opérateurs des techniciens – des con-citoyens – au service d'un pouvoir quelconque! Il se transforment, par les vertus de la rumeur et des faux savoirs qui se propagent, des officiants dotés d'une puissance transcendante, forcément crainte, des prêtres en quelque sorte. Lesquels seraient au service d'un pouvoir occulte, financier, politique...
Que les dictateurs du monde entier s'en prennent d'une manière semblable aux journalistes et aux opposants politiques - qui sont leurs ennemis « naturels » - choque quand il s'agit de nations éloignées ou « en voie d'évolution ». Ces forfaits sont mis sur le compte d'un archaïsme qui tombe sous le sens. Mais que nous fassions « virtuellement » de même avec nos informateurs ne nous vient même pas à l'esprit. Alors que nous nous accordons à dire que nos sociétés entrent dans l'ère du virtuel, il devient donc carrément insensé de se disculper à bon compte en prétendant que, si la presse est libre, que tout citoyen peut encore exprimer ses opinions..., les médias, eux, pourrissent tout, alimentant insidieusement une censure rampante. Dans cette contradiction nous affirmons que nous condamnons virtuellement ceux-ci à une future neutralisation, comme le G.I.A. le fait "physiquement" en Algérie, bientôt en Russie, puis, plus tard, ailleurs.
Pour expliquer plus complètement cette idée, osons quelques métaphores ! En termes militaires, "neutraliser" une adversaire, signifie qu'il s'agit d'empêcher ce dernier de nuire. Les moyens sont laissés à l'appréciation de l'agent chargé de la mission.

En Algérie ou dans d'autres pays où la lutte pour la démocratie passe par la presse, le dessin satirique ou la prise de parole dans les assemblées de communauté, la "neutralisation" de la sédition passe forcément par l'élimination physique. Et si le journaliste exprime des pensées qui vont à l'encontre du pouvoir, on le neutralise. C'est le cas au Nigeria, en Turquie, etc.

Neutraliser signifie tuer, mettre en prison, écarter du circuit social, de la vie communautaire...
Dans nos nations où l'élimination physique de l'adversaire est proscrite, la "neutralisation" s'effectue autrement. On fait obstruction. La parole séditieuse est "mise au ban" des voies "normales" de l'expression. On tue ainsi "virtuellement". Et les façons de le faire demeurent très rationnelles, comme celles des dictateurs. On dit pudiquement chez les éditeurs : "le public boude ce genre de texte". Les secrétariats de rédaction vous disent qu'il "faut rappeler plus tard...". Quand aux plateaux de télévision, si vous n'avez vécu un événement hors du commun qui pourrait gonfler "l'Audimat", il ne faut même pas compter approcher un micro. Il ne vous reste plus alors qu'à vous époumoner au Parc des Princes pour une rencontre P.S.G.-Nantes, ainsi passerez-vous, peut-être votre rage d'être "exclu", de ne pas être entendu des autres, de ne partager avec personne votre mal d'être. À moins que vous ne profitiez d'un mouvement protestataire en faveur de la défense du système social pour exprimer un malaise qui n'a rien à voir avec des revendications matérielles du départ.

"Je me suis lancé dans la bagarre comme conducteur. Le lendemain, je me sentais avant tout cheminot. Puis j'ai endossé l'habit du fonctionnaire. Et maintenant, je me sens tout simplement salarié, comme les gens du privé que j'aimerais rallier à la cause…[2]
La revendication initiale, clairement circonscrite, a disparu, la généralisation, traversée par le flou, dévoile déjà que d'autres insatisfactions, probablement plutôt immatérielles, prennent la rue comme tribune... Mais c'est timidement dit. Il n'y a de place nulle part pour ce type de revendication. On n'ose pas dire que l'on est découragé par le non sens du travail et de la vie en général. On se prend de nostalgie pour ce temps où les travailleurs manifestaient une solidarité qui allait bien au-delà du travail. La vie dans les cités du Nord en est un exemple. Alors la colère s'appuie sur des prétextes institutionnalisés. Des intellectuels, avides de grands mots et sentant confusément qu'un autre discours transcende le premier, se mettent à répéter 1789. Liberté, dignité, etc. "Cette crise est une chance historique pour la France et tous ceux qui refusent la nouvelle alternative : libéralisme ou barbarie.". Il y va fort Pierre Bourdieu ![3]
Est-ce bien là que le malaise se situe ? À suivre ! Car il y aura de toute manière une suite. On ne jugule pas les puissance de l'âme comme on gère une entreprise, ou comme on professe à l'université. Et pour l'instant, dans ce vaste débat qui s'annonce comme la rumeur d'un cirque, il n'est jamais question d'âme ou de quelque chose d'approchant. "Mai 68", au moins, avait du panache et du délire.

Continuons avec nos métaphores.
Dans certains groupes ethniques il existe un châtiment pire que la mort. On punit les plus grands crimes par le bannissement, l'exclusion totale définitive ou pour une durée déterminée hors de la tribu.
Je me souviens des hurlements poussés par un homme de la communauté où je suis né. Je crois qu'il avait été banni à jamais parce qu'il avait violé une femme. Il était resté plusieurs jours, agenouillé aux limites du territoire, à hurler à la mort comme une bête blessée, dans l'indifférence générale, y compris la mienne. Puis il avait soudain disparu, probablement achevé par un inconnu qui avait eu pitié de lui. Nous ne l'avons plus jamais revu, nous n'avons plus jamais prononcé son nom.
Plus que la mort, le bannissement est un châtiment terrible car si la mort peut délivrer du lourd fardeau de la vie, bannir revient à laisser l'être face à lui-même, en débat constant avec sa faute.

Quand partout il n'est question que de "mondes virtuels", de "réalité virtuelle", du pouvoir de l'image, comment ne pas s'interroger sur la puissance de cette obstruction faite aux discours qui sortent du consensus ? Comment continuer à jouer les candides et prétendre que cela n'intéresse personne ? Mais alors pourquoi sont ils si nombreux dans la rue à hurler leur mal être, leur inquiétude sur l'avenir, leur incertitude pour demain, leur impossibilité d'envisager le même futur que celui de leurs parents ? Les journalistes, les médias sont-ils en cause dans tout cela ?

Qu'à cela ne tienne monsieur l'éditeur, vous avez justement un spécialiste de la question qui va vous sortir un livre sous trois jours... Question de montrer que vous donnez dans le social. Vous allez "interviouver" qui ? Pierre Bourdieu ? non Alain Touraine peut-être ? Ah oui vous avez sûrement raison, depuis le temps qu'ils traînent des idées nouvelles sur tous les plateaux de télé, vous êtes sûr que Bernard Pivot parlera de vous. Il y a des nouveautés qui vivent aussi longtemps que des oliviers... Regardez Jésus !

Suis-je en train d'écrire que nous sommes en plein totalitarisme intellectuel, "virtuel" tout au moins et que le bannissement, "l'exclusion", constituent un châtiment que les nouveaux nobles ont choisi pour les roturiers révoltés ? On pourrait le croire en première lecture. Ce serait oublier un peu vite que nous sommes en Démocratie ! Cela veut dire, entre autre, que quiconque est libre d'exprimer ses opinions comme il l'entend... C'est vrai !
Mais comment ?

Monsieur l'intellectuel de gauche qui voulez "faire entendre le refus qui s'exprime dans le mouvement actuel"[4], n'est-ce pas du paternalisme pur et simple. Vous les prenez pour qui les "gens qui sont dans la rue" ? pour une sous-catégorie de citoyens auxquels vous tendez une main fort généreuse, la vôtre bien entendu. Vous allez peut-être demander une subvention pour éditer un journal de grévistes ? et pourquoi pas de SDF ? ça marche fort en ce moment !

On dit en Afrique, à propos de l'aide humanitaire : "Quand vous donnez à manger à cent personnes vous en affamez dix milles. Donnez-nous de quoi planter des graines, nous pourrons nourrir un million de bouches."
...

Cruel n'est-ce pas ? Mais ce sont des Africains qui parlent ! Des Africains qui en ont assez de vos complaisances de nantis, qui savent en fait que vous liquidez vos angoisses personnelles à bon compte. Rien d'autre !
Non monsieur l'intellectuel de gauche, ne nous laissez pas la parole,[5] c'est votre place que nous voulons. 1789 a balayé les clercs, votre tour viendra. La liberté est au bout du fusil ! "virtuel" bien sûr.

Mais à trop dénoncer le "virtuel", certains savent qu'il revient à la réalité sous une forme bien plus réelle, folle souvent.
Les psys redoutent ces effets de retour du refoulé.

En attendant si nous voulons dire autre chose que ce que vous affirmez depuis vos cours à l'université il nous reste l'underground du virtuel.

Et s'il n'existe pas de surface toute faite pour la diffusion des idées nouvelles, il est inutile d'aller la revendiquer auprès des princes de la nation, on peut se mobiliser pour user de celles que les techniques nouvelles nous offrent : réseaux informatiques — Internet pourquoi pas ! —, mode shareware[6] , feuillets libres comme ceux que les branchés de musique lisent. Nul ne contrôle, pour l'instant, ces nouveaux médias[7] et la librairie n'est plus le passage obligé des paroles écrites.

Il ne manque pas de supports possibles pour la diffusion des idées nouvelles ou anciennes, bonnes ou mauvaise — l'histoire finira par trier — à condition de sortir des lieux communs et des préjugés diffusés par une élite en place qui s'entretient dans son propre pessimisme.

Du rôle des intellectuels

Quand l'on est ainsi convaincu que des institutions se sont détournées de leur but initial, on prend position et on en fait un combat, une lutte idéologique ! On ne peut critiquer le Prince et picorer dans sa main au premier claquement de doigt. On profite de son temps de parole à la télévision ou à la radio, dans les colonnes du journal Le Monde pour dénoncer l'ineptie des médias. Puisque c'est ce que l'on pense.
Il est toujours rassurant de parler de la décadence des autres pour mieux s'aveugler sur la sienne. Il est de bon ton de parler de la violence des banlieues pour mieux s'opposer et de se sentir les élans protecteurs d'un bon papa adjudant. Cela évite de s'interroger sur la violence rampante des milieux protégés. L'analogie qui en découlerait soulèverait trop de problèmes plus fondamentaux pour lesquels ni la Science ni la Philosophie n'ont de réponses toutes faites. Il existe une place à prendre dans la cour des miracles de nos États, à condition de sortir de cette fascination abrutissante pour les plateaux de télé. Les bouillons de culture que l'on peut y consommer ont un vieux goût de recuit, seules des ambiances précieuses leur confèrent un vernis de raffinement.
Il est du rôle et du devoir de l'intellectuel de penser aux moyens de création et de diffusion des idées aptes à répondre au défi de la crise, cette sourde transformation, qui traverse nos sociétés policées. Il leur appartient de mettre en forme un futur qui se réalise d'abord sous l'apparence d'objets bruts. S'il ne le font pas, comme il s'agit d'une fonction naturelle et nécessaire aux société humaines, d'autres le font à leur place. Peut-être est ce que l'on reproche aux médias ? On leur refuserait toute compétence à penser et à traduire. C'est un peu fort mais c'est aussi l'aveu des clercs eux-mêmes sur leur impuissance à infléchir le cours du monde. À force de critiquer tout ce qui bouge et qui vit, les voilà confrontés à leur insignifiance. Mais cela ne les empêche nullement d'occuper les micros pour claironner leur non-savoir.

Mais que l'on cesse de dire aux autres ce qui est le mieux pour la Bosnie, contre les Serbes, contre la junte du Nigeria ou pour éduquer nos bambins...

Vous-même, n'est-ce pas, qu'avez-vous fait pour la Bosnie, le Rwanda ou simplement pour l'exclu qui demeure à la porte de votre immeuble ? Rien ! Vous faites donc bien partie de la classe des nantis et des égoïstes ! Et si vous vous rebellez contre cette idée car il vous semble avoir du cœur, il ne vous reste plus qu'à ressasser votre amertume et votre sentiment d'indignité. Il vous arrive alors de penser à ces époques utopiques où l'Homme vivait à la mesure de la nature et du temps. Il savait goûter, vous non. Et la terrible marche rétrograde est enclenchée. Vous voilà déjà pris au piège d'une morale de la désespérance.
Normal c'est dans l'air !
Notre monde est décidément décadent ! C'est ce que vous allez vous mettre à maugréer, comme les autres. Mais réussirez-vous vraiment à freiner l'élan sauvage des progrès en tous genres ?
...

Il vous reste à méditer sur votre propre exclusion de ce monde-là, celui qui bouge à la vitesse des ordinateurs et des images virtuelles, à laisser la nostalgie vous envahir. Adieu, le village, son église et son "Café de la Place" ! La publicité d'une radio connue vous avertit : "Si t'as pas la nostalgie, t'as pas de futur !"[8]. Vous n'aurez plus qu'à vous faire à cette ambiance d'orage qui n'éclate jamais.

 

Non Messieurs les intellectuels, de gauche, ou de droite d'ailleurs — au point où j'en suis je puis à mon tour généraliser — nos sociétés ne sont pas verrouillées, il n'y pas de censure rampante, il y a l'`establishment', et puis il y a les autres, Les Gens !

Vous risquez votre pouvoir, mais ceux-là que risquent-ils, que l'infinie joie d'être, d'exister enfin, à prendre la parole un jour, sans vous. Il reste à prévoir comment elle se prendra.
Certains, pris de révolte se prennent à vouloir restaurer les antiques valeurs, celles du bon sens et des journées qui s'étirent paisibles comme dans un roman de Jean de la Varende[9]. Il s'impose alors à quelques esprits lucides l'idée terrible que cette sorte de régression pourrait ne pas s'arrêter. Il ne s'agirait pas d'un réel retour aux traditions - on sait que celles-ci sont surannées - mais d'une puissante "marche rétrograde" dont les signes sensibles existent à tous les niveaux : racisme, perte des sources essentielles du droit à l'égard des personnes, exclusion pure et simple de ceux qui sortent de la norme mais aussi refus de l'environnement technique promu au rang de bouc émissaire et de démon de fin de siècle.

L'homme et la femme "civilisés" considèrent leur société comme un modèle d'ordre et de sécurité, où tout perturbateur est vécu comme un barbare, un démon, un diable porteur des affres du désordre et du chaos. Que cette attitude se transforme en slogan politique pour mieux chasser cet intrus malfaisant n'a rien de surprenant, ce sont les mythes du monde moderne, greffés sur une cosmogonie[10] qui ne s'est pas renouvelée depuis des millénaires, qui nous taraudent. L'atteinte portée au calme des villes, la moindre frustration - relayée, amplifiée et largement commentée par le tapage médiatique - génère de gigantesques crises urticantes. On ne prend pas en compte l'événement, sa qualité, sa portée humaine, mais l'émotion qu'il suscite. On passe volontiers et "sans transition" du nettoyage ethnique en Bosnie à la victoire de l'équipe de France de football sur celle de Pologne. Puis l'actualité nous branche en direct sur les attentats fomentés par le GIA et plus rien d'autre ne compte que cela, même si vous habitez Figeac. Mais rien ne change dans votre vie. Demain, vous prévoyez de recevoir vos amis, vous parlerez de choses et d'autres, du quotidien... le vôtre ! Et de notre balcon, des paysages de laque défilent sous nos yeux. Parfois, un intrus y fait irruption. Des réflexes rodés depuis des siècles se mettent à opérer, cadenas, verrous, angoisse, fantasmes... Qui c'est celui-là ?... Entre l'intrus et vous se noue un étrange lien. Chacun se connaît, de part et d'autre de la barrière.

L'étrangeté est suspecte, elle perturbe, elle émeut parce qu'elle seule sait entrer dans notre champ de perception..
De quoi s'agit-il donc, de l'effet des médias ou d'un problème qui remonte aux sources idéologiques de nos sociétés, à leur absence de perspectives ? Non, décidément, les médias, s'ils sont en cause, ne sont pas seuls !

Kieser El Baz, Paris le 10/12/97



[1] – Edgar Morin, dans son journal, Une année Sysiphe, p. 44, rapporte une anecdote semblable. S'interrogeant sur l'état du monde, il s'arrête sur un épisode banal qui le fait sortir de son immeuble. Quelques lignes plus tôt il réfléchissait sur l'opportunité de descendre dans la rue pour se joindre à une manifestation pour l'école laïque...

[2]Le Monde du 13 décembre 1995, première page, sous le titre : « Des grévistes : Demain ne sera plus comme hier, il faudra du respect !. »

[3]Le Monde du 14 décembre 1995, première page, sous le titre : « Pierre Bourdieu choisit la grève contre la `barbarie'. »

[4] – Philippe Corcuff, « Les intellectuels doivent faire entendre le refus de la rue », in Info Matin du 11 décembre 1995, quatrième de couverture.

[5] – La péripharase est jolie : « Laissez votre parole, on s'en occupe ! ». Il y a, comme ça, sans que l'on s'en rende compte des « garderies pour paroles ». Les émules de Dolto pour « pensées-enfants » vous y attendent. Et vous en seriez, bien sûr, la mauvaise mère.

[6] – Le moyen de diffusion en libre essai ou shareware, nous vient des pays anglo-saxons. On diffuse une œuvre et celle-ci n'est payée que si l'utilisateur décide d'en faire une utilisation constante. Les droits sont directement payés à l'auteur, le distributeur se contentant de facturer ses frais de fonctionnement au départ. Ce moyen de diffusion est communément utilisé par les créateurs de logiciels qui peuvent ainsi se faire connaître facilement. Certains, d'ailleurs, sont sortis de l'ombre et leur création a été achetée par les grands tels Microsoft Corporation.

[7] – On s'en inquiète cependant et l'on fourbit les armes d'une censure d'un nouveau genre.

[8]Radio Nostalgie, publicité en grands panneaux, campagne publicitaire d’octobre 1995.

[9] – Auteur de romans qui retracent la vie des nobles sous l'ancien régime.

[10] – Cosmogonie ou représentation du monde. Par un curieux hasard, ce sont les astronomes qui ont remis ce mot au goût du jour.

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