Mythes, rites, rêves et rumeurs


De l'étranger au monde

Dialectique de la mémoire et de la nature
Parution intégrale in Hommes et Faits novembre 2000

Jacques Halbronn, docteur ès Lettres

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Resume

From the stranger in the world
An essay about the dialectics between memory and nature

For a Psychoanalysis of nature

Our reflexion is directed around the shift and of the difficulties suitable for the passage of a culture towards another one. The main difficulty holds with the illusion that the men are... men and that the culture is only epiphenomene. Indeed, the man endeavours to overcome, to turn the back on nature, to introduce different cleavages, even of going against nature, taking the opposite course to it, contrary to Antigone which preaches a natural right. Thus was appropriate, in the second time, to develop a psychoanalysis of nature. Just like the member of the group must be conscious of the ditch which separates it from another group, in spite of this common humanity, the group himself could not be structured without assuming a duality.

It is initially important to integrate this duality which is in ourselves, therefore to be able of a certain distance vis-a-vis to reality The Man could not let himself dictate his way by the only reference to nature because it is the path of the involution, of the return on its steps. There is decline, precisely, when there is nothing any more but only one reading of the things, when one loses conscience of axiomatic and the axiologies. Not to perceive the duality of a situation, it is to remain apart from its problems. The search of duality will appear at various levels in time and space. There are two faces to assume, that of nature and that of the culture, that of the inside and outside. To want to reduce this dialectical movement to a unidimensional approach can only bring to the misinterpretation. The duality that we recommend is not that from stranger of the group but from the stranger in the world.

There are two ways of living the duality: while moving laterally and while rising upwards These two paths obey different logics. When we are in a place, our glance could not be same as that of which perceives this place of one elsewhere. Which speech can I hold with that which is not initiated and how that which does not know must it proceed to know? The passage of a field to another is always delicate and not to be aware that that made problem requires a certain amount of naivety. The illusion holds so that one exaggerates the weight of nature compared to the culture, that one minimizes that of the practices compared to that of the ideas.

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Pour une psychanalyse de la nature

Notre réflexion s'oriente autour du décalage[1] et des difficultés propres au passage d'une culture vers une autre. La difficulté principale tient à l'illusion que les hommes sont... des hommes et que la culture n'est qu'épiphénomène. En effet, l'homme s'efforce de vaincre, de tourner le dos à la nature, d'introduire des clivages autres, voire d'aller contre nature, d'en prendre le contre-pied, contrairement à Antigone qui prône un droit naturel. Il convenait donc, dans un deuxième temps, de développer une psychanalyse de la nature. Tout comme le membre du groupe doit être conscient du fossé qui le sépare d'un autre groupe, malgré cette humanité commune, le groupe lui même ne saurait se structurer sans assumer une certaine dualité.

Il importe d'abord d'intégrer cette dualité qui est en nous mêmes, donc d'être capable d'une certaine distance face au réel. L'Homme ne saurait se laisser dicter sa voie par la seule référence à la nature car c'est le chemin de l'involution, du retour sur ses pas. Il y a décadence, précisément, lorsqu'il n'y a plus qu'une seule lecture des choses, lorsqu'on perd conscience des axiomatiques et des axiologies. Ne pas percevoir la dualité d'une situation, c'est rester en dehors de sa problématique.

La quête de dualité se manifestera à différents niveaux dans le temps et dans l'espace. Il y a deux faces à assumer, celle de la nature et celle de la culture, celle de l'intérieur et de l'extérieur. Vouloir réduire ce mouvement dialectique à une approche unidimensionnelle ne peut qu'amener au contresens. La dualité que nous recommandons n'est pas celle de l'étranger au groupe mais de l'étranger au monde.

Il y a deux façons de vivre la dualité : en se déplaçant latéralement et en s'élevant de bas en haut. Ces deux chemins obéissent à des logiques différentes. Quand nous sommes dans un lieu, notre regard ne saurait être le même que celui de qui perçoit ce lieu d'un ailleurs. Quel discours puis-je tenir à celui qui n'est pas initié et comment celui qui ne sait pas doit il procéder pour savoir ? Le passage d'un champ à un autre est toujours délicat et ne pas avoir conscience que cela fait problème exige une certaine dose de naïveté. L'illusion tient à ce que l'on exagère le poids de la nature par rapport à la culture, que l'on minimise celui des habitudes par rapport à celui des idées.

 

La dualité est menacée par ceux qui identifient savoir et pouvoir. C'est ainsi qu'il existerait, selon E. Meichelbeck[2], une « logique du pouvoir » s'opposant à une logique du savoir. Si la logique du savoir est dans la collection des informations, la logique du pouvoir relève de la séduction et de la conviction. L'adage « Si jeunesse savait et si vieillesse pouvait » mérite réflexion : il y aurait, en effet, d'un côté, les volontaristes, les activistes, qui provoquent et produisent les événements, les phénomènes, qui prennent plaisir à décider de ce qui sera[3] de l'autre, ceux qui ont l'humilité d'apprendre à comprendre. La jeunesse s'enivre de ce que la décision peut avoir de magique, elle sent qu'elle a la force de faire arriver, advenir, naître et mourir. Elle s'enivre de son pouvoir magique. L'âge amène à un plus grand respect des structures en place. On ne joue plus parce qu'on a payé cher certains actes gratuits et parfois regretté qu'on nous ait laissé passer à l'acte. Cela tient à un processus très simple : le poids du passé – le prix de ces fameuses décisions – n'est précisément pas le même.

Cette dialectique doit être bien maîtrisée : la liberté d'action, si on en abuse, aboutit à sa suppression à court terme – qu'il s'agisse de la sanction judiciaire ou d'un certain gaspillage de ses chances. Il faut alors inventer une nouvelle définition de la liberté, qui est celle d'arriver dans la vie où l'on veut aller, d'avoir prise sur les événements.

Il reste que l'on est souvent tenté de présenter les décisions que l'on prend pour autre chose que ce qu'elles sont et qu'on s'efforce de les justifier par la prise en compte de tel ou tel paramètres. Mais inversement, certains se disent libres alors qu'ils sont manipulés, conditionnés. Chacun s'appuie sur les valeurs du concept opposé : les hommes de pouvoir revendiquent le savoir, celui par exemple des experts, les hommes de savoir se plaisent à se dire libres et à découvrir des plages d'indétermination dans leurs observations.

Il y a donc dans ces comportements des attitudes paradoxales qui transparaissent au niveau du langage : c'est ainsi que l'on oppose généralement « libre arbitre » à « arbitraire » et que l'arbitrage est encore perçu comme correspondant à un autre champ sémantique.

Si libre arbitre semble synonyme de liberté, il implique par son deuxième terme l'idée de jugement et tout jugement présente un caractère tranchant. En fait, la liberté des autres, vue sous cet angle, est difficilement supportable. Il y a deux poids deux mesures : lorsque nous décidons, c'est du libre arbitre, quand les autres décident, c'est de l'arbitraire. Sémantiquement, il y a un autre champ intéressant et polysémique, autour du mot « ordre » qui signifie à la fois un commandement et une harmonie, un cosmos. Celui qui a le pouvoir a la charge d'organiser et celui qui organise se voit conférer une certaine autorité, le terme signifiant d'ailleurs que l'on est « auteur », acteur.

 

Mais il conviendrait aussi de mettre en relief le fait que toute liberté est relative à des potentialités, donc à des pouvoirs. Un étranger qui serait pourvu d'une structure différente fausserait le jeu à la fois par ses forces et par ses faiblesses. Si l'on en croit la Déclaration des Droits de l'Homme, la liberté s'arrête là où elle compromet celle d'autrui. Or, par voie de conséquence, il nous semble que la liberté est un phénomène social, qui s'organise à partir des possibilités d'un groupe donné. La liberté chez les aveugles n'est pas la même que chez ceux qui voient, et elle est encore différente, a priori, chez les « voyants » ou les « extralucides ». En cela, il n'y a pas de liberté sans égalité. Un surhomme devient vite indésirable mais il est clair que la modernité rend obsolètes certaines valeurs du fait du nivellement ainsi produit. Mais la liberté tient autant aux limitations que nous nous imposons qu'à celles qui s'imposent à nous. Qu'est ce par exemple que la notion de « gêne » ? Elle est liée à celle de territoire, et éminemment relative. Constamment, nous sommes tentés d'absolutiser nos propos et donc d'oublier la valeur ajoutée apportée par l'Homme. Il y a crise de société lorsque ses membres n'ont plus le courage d'assumer leurs propres décisions en proclamant « tel est notre bon plaisir ».

Une dualité honteuse

La liberté d'expression ne se trouvera pas systématiquement accrue dans l'absolu du fait que l'autre est différent.

La dualité thérapeutique

Le champ de la thérapie est duel par excellence puisqu'il faut à la fois – notamment en psychanalyse – croire et ne pas croire, s'attacher et se détacher. L'homme a la capacité, lorsque cela l'arrange, de demander à une partie de lui même d'accepter ce que l'autre partie rejette. Il est en mesure de s'anesthésier pour mieux supporter la douleur, son cerveau secrète sa propre drogue.

L'influence des astres

Si l'on considère l'Astrologie, le pouvoir est passé vers le savoir lorsque l'influence des astres est devenu un « fait » et vers le concevoir lorsqu'elle est devenue un mythe. Il y a en effet deux Astrologies, celle qui existe statistiquement et celle qui est un très vieux projet jamais abouti. Mais qu'est ce qui empêche l'astrologie d'être une science ?

La dialectique Nature – Culture

L'Homme a-t-il résolu, philosophiquement, son rapport à la Nature ? Le problème de la liberté de l'Homme se pose d'abord contre la Nature. On connaît l'expression de Vercors : « Les animaux dénaturés ».

Critique du symbole

Nous ne croyons pas que le symbole, cher aux astrologues et aux psychanalystes, porte en lui même une signification intrinsèque, universelle.

Nature et violence

Lorsque les hommes n'arrivent pas à s'entendre sur un code qui notamment fournisse les signes de l'amour et de la haine, de l'acceptation et du refus, alors ils sont contraints d'en revenir au niveau de la nature : sexe, violence ou à celui de la culture : argent.

Le dépassement de la nature

La dignité de l'Homme passe par un oubli de la nature, rappeler à l'Homme cette dimension naturelle, c'est le bafouer, c'est le réduire à peu de choses, l'aplatir, l'écraser.

 

La pathologie de la liberté

La liberté n'est pas un bien acquis une fois pour toutes. Il peut arriver à chacun de nous de perdre le contrôle de ce qui nous entoure.

Évidemment, renoncer à contrôler un savoir ou un pouvoir peut donner le sentiment de l'illimité, de l'absence de restriction.

La nature au secours de la culture

Mais il est des cas où l'Homme doit savoir se rappeler qu'une dimension en lui est de l'ordre de la nature, ce qui lui permet de se libérer de ses propres constructions d'apprenti-sorcier...

Il est sous entendu que chaque homme doit être capable de se programmer par rapport aux règles actuellement en vigueur.

Apologie pour la guerre civile

On a généralement tendance à considérer la guerre civile comme plus insupportable que le conflit entre deux sociétés étrangères l'une à l'autre. En fait, l'enjeu métaphysique, en quelque sorte, n'est pas du tout le même. Avec la guerre civile, l'on assiste à une remise en cause d'un certain état de société dont une partie des membres est menacée, réciproquement ou non, par l'autre. La société tend ainsi à se déstabiliser dans la mesure où certains de ses éléments vont être supprimés physiquement, relégués, bannis, bref vont changer de statut.

Pourquoi l'antisémitisme ? [4]

Quelle est la mission des Juifs ? Le Juif est comme un fil qu'il suffit de tirer pour que tout l'édifice s'écroule. S'en prendre au Juif a de ce fait quelque chose de suicidaire mais en considérant le suicide comme une transformation.

Science et Nature

Rien ne vaut pour dépasser une théorie un peu ancienne que d'introduire des « faits » nouveaux qui ne relèvent pas du seul système. L'intrusion d'observations rigoureuses va périodiquement permettre à la science de sortir de son carcan.

 Conclusion

La recherche d'unité, d'harmonie, implique une certaine amnésie....

 

 

Jacques Halbronn

Paris 1993


[1] – Cf. un texte précédent , paru dans la revue Conscience de en 1991 : Psychanalyse de l'Étranger et Une anthropologie de l’étranger, sur ce site, éd. 11/11/00.

[2] – Article paru in Sophon.

[3] – Herzl disait il y a un siècle à propos du retour à Jérusalem « Si vous le voulez, ce ne sera pas une légende ».

[4] – Cf. La question juive face à l'occultisme, par J. Halbronn et A. Kieser, Paris Ed. H. Veyrier 1991.

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