Excuse toujours ton fr�re et ne porte pas sur lui le jugement implacable de celui qui ne comprend pas les situations d�sesp�r�es.

Al-Qasim al-Hariri

Eva de Vitray-Meyerovitch, �crivain et traductrice, a largement contribu� � briser bon nombre de pr�jug�s autour de l’Islam et, gr�ce � son �uvre, de nombreux chercheurs ont ouvert leur curiosit� l’Orient. Ele fut longtemps charg�e de recherche au CNRS.

Eva de Vitray-Meyerovitch est n�e en 1909 dans une famille catholique de l’aristocratie fran�aise. Rien ne la pr�destinait � se plonger avec courage dans l’�tude de la philosophie et de la mystique islamique. Son �uvre gagne � �tre connue au temps ou de nouveaux pr�jug�s occultent la part consid�rable de l’apport de l’Islam � la culture occidentale.

Dans ses m�moires, son nom restera � jamais associ� � celui d’un des plus grands po�tes de l’histoire de l’humanit�, le grand ma�tre soufi du Xlle si�cle, Jal�l od-d�n R�m�. La qualit� de ses traductions a permis de faire go�ter � la France et au monde entier la beaut� et la profondeur d’une �uvre qui bouleverse les �mes en qu�te de sens. Son �nergie �tait enti�rement au service d’une soif de connaissance jamais �tanch�e. Sa curiosit� et son d�sir de ne jamais tricher la poussaient toujours un peu plus loin dans le d�sir de perfection. Car, ce qu’il y a peut-�tre de plus remarquable dans son itin�raire est que sa vie et son engagement personnel �taient dans le prolongement exact de ses investigations intellectuelles.

Son �uvre �crite n’aurait certainement pas atteint cette dimension si elle-m�me n’avait pas go�t� les d�lices spirituels qui sont si magistralement �voqu�s par R�m�. Eva de Vitray n’�tait pas une personne plong�e en permanence dans les livres. Elle s’int�ressait de pr�s aux autres et se sentait tr�s concern�e par les questions d’actualit�. Il lui a �t� donn� de rencontrer des personnages marquants tout au long de sa vie, mais il en est un qui occupe une place toute particuli�re, puisqu’elle le choisit comme guide spirituel alors qu’elle avait pourtant atteint un �ge avanc�.

Les circonstances de leur premi�re rencontre rappellent d’ailleurs la magie et la fulgurance de la rencontre entre R�m� et son propre ma�tre, Chams de Tabriz, au cours de laquelle les mots �chang�s furent le vecteur d’une transmission de c�ur � c�ur. Lors d’un de ses nombreux s�jours au Maroc, Eva avait �t� introduite chez ce ma�tre qui avait accept� de la recevoir dans son appartement priv�. D�s qu’il vit Eva, le ma�tre dit�: ��R�m� est ici�!�� en montrant du doigt l’emplacement de son c�ur. Cette phrase et ce geste eurent un impact inattendu sur Eva qui s’effondra en larmes, saisie par un �tat spirituel irr�pressible. Elle, qui avait tellement voyag�, qui avait connu tous les honneurs, qui connaissait tant de choses, succombait spontan�ment � l’appel de son c�ur. Jusqu’� la fin, Eva avait gard� intact son potentiel de disciple, c’est � dire cette pauvret� int�rieure sans laquelle il n y a pas de transformation v�ritable de l’�tre.

Eva de Vitray-Meyerovitch s’est �teinte en juillet 2001.

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