Le 11/05/98
Ce jour se d�roule sur fond p�le de drap de lit, je reste immobile,
Je ne chasse m�me pas les heures lascives, je suis sur la photographie de ce jour avant m�me de l’avoir v�cu.
Quelle est cette �trange force qui tisse les fils de ma m�moire�?
Un jour est rempli moiti� de plein, moiti� de vide, instantan� clich� de notre propre impuissance.
Les jours de survivance d�filent comme un paysage derri�re la vitre d’un train,
press�s d’en finir de ce voyage lourd de r�ves morts gisants sur les bords de la voie.
Las de la moindre tentative de d�part, je refuse un temps certain le d�collage de mes pieds.
Je me rapproche de mes livres, jusqu’� sentir l’immobilit� de la page, puis je glisse sur mon sommeil pour rejoindre le monde des vivants.
Je voudrais apprivoiser ma mort, afin de jouer ma vie.
Brouillard sur les eaux plates du jour
Je godille lentement mon corps lourd
A demi noy�, � fleur des vagues
J’avance sans bruit au c�ur du silence
O� l’ennui coule en fleuve d’argent
De mes veines ouvertes aux vents.
Je cultive encore quelques fragments d’une terre boulevers�e
Un man�ge qui tourne sur des flonflons
Moi vieil enfant � califourchon
Toujours sur les m�mes raisons
A user mes fonds de pantalon
J’�cluse les jours puis les semaines am�res, je suis clou� au sol par un marteau invisible
L’activit� se ralentit le temps s’acc�l�re j’accouche d’un tourbillon d’ennui qui me centrifuge
Sur les vitres du n�ant avec mon squelette en dedans
Juste un petit souffle chaud continue � battre sans bruit
Il soul�ve la poussi�re des si�cles sur les �tag�res vides
Il d�calamine les tuyaux des r�ves us�s
Puis
Je reprends la barre et je siffle les heures
EN AVANT TOUTE�!
Obsessions plurielles
Enfants pris par tous les bouts de ma m�moire, saturent mes images de la vie, ressuscitent mes peurs
Je reste immobile face � ma pr�histoire.
Dans cet espace l�, je me fige � retourner le m�me ciment.
La pens�e de la mort � force de trop la regarder de l’int�rieur m’envahit comme la mauvaise herbe et les jours s’alourdissent comme de la boue jusqu’� peser des si�cles.
Essayons d’�crire sur ces images simplement�:
Chaque jour me reviens le souvenir de mon p�re qui abusait de moi, j’avais au d�but environ 6 ou 7 ans, tout est flou, je me rappelle mes d�sob�issances, le cachot o� m’enfermait ma m�re, et surtout les derri�res de portes o� m’attendait mon p�re�; le go�t de la vie a parfois un go�t de sperme et d’incompr�hension vertigineuse. Je voudrais prendre un peu de distance mais aujourd’hui il me semble m’y replonger de moi m�me, malgr� moi. Comme si je cherchais une rupture � vivre.
Je me cherche des raisons, des raisons de quoi�?
Je baigne dans une culpabilit� fossilis�e qui nourrit ma m�lancolie .C’est peut-�tre le vide actuel qui r�veille les vieilles blessures.
Comme une prison du souvenir sans avenir.
J’avais peur de mon p�re, de me faire surprendre, c’est pour �a que j’aimais vivre dehors, le fait m�me d’�crire est violent, il faut trouver une distance afin de vider les images et les mots de leur toxicit�. Ecrire sur l’enfance violemment, tendrement b�tement etc. etc., �crire une histoire courte puis les variations.
L’horreur de la guerre est li� avec l’autorisation mentale que se donne un individu pour imposer ses violences internes (sous formes psychiques ou physiques) � un enfant.
Quand le droit international autorise le droit de tuer � chaque soldat, tout dans la vie civile par la suite se retrouve en dessous de cette limite. De l�, la cicatrisation des blessures de guerre peut prendre des formes perverses autoris�es.
L’enfant se retrouve seul face aux blessures mentales du monde�; son incompr�hension est immense devant la militarisation des sentiments, devant le chaos de la sexualit�.
Je suis n� d’une blessure de guerre, et ma convalescence durera jusqu’� ma mort.
Il est pri� avec force mais en silence de ne pas remuer la merde des adultes avec ses questions au bout des yeux, comme un gigantesque coup de pied au cul.
Je ne suis plus cet enfant, mais c’est lui qui m’a enfant�; Et comme un fils � son p�re, je lui dit merde.
Mon plus grand d�go�t reste et restera le pouvoir et ses casernes de la pens�e.
Heureusement pour le monde, il reste les papillons.
Suite en si # et do b
Sur un air de clarinette, s’effacent les tra�n�es de l’histoire, mon c�ur est plein de rats qui courent se noyer � la fontaine profonde, et la dur�e de cette minute me sourit en murmurant l’�ternit� de cet instant.
Mon enfant m’a gliss� trois notes l�g�res dans la t�te qui siffleront toujours
Je tourne mes peurs 7 fois dans mon ventre avant de les coucher de force sur la page blanche, sorte de virginit� bon march� o� tente de s’�crire ma propre m�moire bless�e.
Je ne sais quoi faire d’un sentiment incertain mais tenace envers mes vieux comme on dit�;
Mes pens�es partent � la p�che tous les matins puis s’emm�lent dans les fils d’une violence cach�e.
J’ai envie d’�crire violent pour vivre mes guerres internes et affronter ma peur en combat singulier.
Ce combat avec mon p�re � l’�ge de huit ans m’a laiss� le go�t de la d�faite.
J’ai jou� au guerrier par la suite jusqu’� l’�ge de 15 ans .Malgr� ma solitude et ma rage face au d’�gout que m’inspirait les attaques surprises de mon p�re, je faisais front comme je pouvais.
Je me souviens avoir eu la force de dire non � mon p�re vers 11 o� 12 ans gr�ce peut-�tre � la conscience que je prenais de mon corps face � mes premiers �mois amoureux. C’�tait la ni�ce de Mme�T. une tr�s jolie slave de 13 ans. Macha.
Je grandissais et la violence se tournait avec force du c�t� de ma m�re, dans un �lan lib�rateur.
Ses claques n’�taient plus efficaces et je la traitais de tous les noms�; de putain, de merde, de tout, avec la plus extr�me violence.
Je fus coup� net dans cette entreprise somme toute r�paratrice par la rupture d�finitive de ce p�re adoptif et du reste de la famille.
L’acte du viol de son fils dans un premier temps puis de la m�re de sa femme ensuite dans le secret des familles reste l’action d’un homme faible et pervers emport� par la peur de sa vie faisant subir sa propre honte � plus faible que lui.
J’ai le sentiment de porter encore une part de cette honte qui remonte sans doute au del� de ce p�re pour se perdre dans la fosse des g�n�rations malades.
Quel peut �tre le germe de tout ce magma, o� les r�surgences troubles des familles enterr�es marquent au fer rouge le destin de leurs enfants, selon des lois inconnues�?
Quelle monnaie de singe tr�buche sur la balance du temps.
Il y a dans le vide des jours qui coulent, un fleuve qui cicatrise les blessures, tout en charriant dans le courant les vieux troncs que nous sommes, jusqu’� la mort.
Aujourd’hui le 1er Mai 1999, je pense que je me suis tromp�:
J’ai trop souvent agi en cherchant des gens pour faire un nouveau projet.
Alors que c’est en voulant faire un projet que l’on trouve les gens.
Rolland