Imre Kertesz a connu comme Juif le camp de concentration nazi et comme Hongrois le joug sovi�tique. De cette double exp�rience de l’asservissement, l’�crivain qu’il est devenu tire une magistrale le�on de libert�. Il a lu Kant et sa Critique du jugement avec la fra�cheur d’esprit et l’exigence de l’autodidacte qui demande � la pens�e de nourrir la vie�: c’est l’individu qui fait le monde et non le poids social. C’est d’abord en lui-m�me que l’individu doit d�nouer les contraintes pour d�gager le sujet transcendantal qui se d�ploie en regard sur le monde
Je fais mienne cette certitude. Se trouve ainsi red�couverte –�et r�interpr�t�e pour la d�gager des cendres du temps- cette libert� int�rieure qui assurait la s�r�nit� du sage sto�cien�–�et qui a �t� mise � mal par l’inventaire de tous les d�terminismes selon lesquels nous serions les produits d’un monde que notre langage ne fait qu’�nonner. C’est � partir de cet inventaire qu’on a pu croire que la libert� n’�tait plus affaire de sagesse mais uniquement de militantisme conqu�rant�: le combat du r�volutionnaire meneur d’hommes remplace la parole mesur�e du sage. Pourtant, quand les contraintes tombent, la question demeure de savoir de quoi l’on est libre et pour quoi.
Il ne s’agit certes pas de renoncer � lutter contre toutes les formes de l’oppression mais de comprendre que c’est la libert� int�rieure qui fonde et authentifie tout mouvement de lib�ration. Toute r�volution lib�re des �nergies qu’il s’agit d’investir dans une reconstruction de l’homme et l’on voit bien, h�las�! qu’aucune r�volution ne r�ussit dans cette entreprise d’humanisation. C’est que la libert� est un leurre si elle n’est pas v�cue aussi de l’int�rieur comme exigence, comme qualit� d’�tre et d’existence.
La d�marche psychanalytique quand elle ne tombe pas dans le psittacisme explicatif par le zizi de papa et le giron de maman, est une recherche de libert� int�rieure. La cure psychanalytique d�bouche sur une t�che�: il s’agit de reconna�tre l’�nergie instinctuelle, non pour s’y soumettre mais pour l’humaniser en l’int�grant dans un projet d’existence.
La t�che est difficile et ind�finie car elle renvoie constamment l’individu � sa responsabilit�. Il est plus commode de l’escamoter dans un libertinage satisfait ou d�sesp�r�. On voit bien, par exemple, que la lib�ration sexuelle n’a pas�–�pas encore�?�–�humanis� le sexe. Elle n’a gu�re fait que ramener le d�sir � la pesanteur du besoin ou � l’impatience du caprice, le rapport sexuel � un acte de consommation, le corps sexu� � une d�bauche de repr�sentations publicitaires et ruminantes. Que faire�–�de soi et de l’autre�–�dans la rencontre sexuelle enfin d�barrass�e des tabous�?
L� comme ailleurs la question reste enti�re�: �tre libre de quoi�? �tre libre pour quoi�?